Malte, ou « le martyre d'une île »
Introduction
L'archipel de Malte
A 90 km de la Sicile, à 300 km de la Tunisie et à 350 km de la Libye se dresse une île qui sera le cauchemar des Italiens et de l'Afrikakorps d'Erwin Rommel. « Un porte-avions insubmersible », dira Churchill. « Une infection à guérir », répliquera Hitler. Son nom ? Malte.
Malte est un archipel constitué de trois grandes îles (Malte, Gozo et Camino) et d'un îlot (Filfla). En 1940 la population maltaise s'élevait à environ 250 000 habitants pour une superficie totale de 250 Km².
La capitale, La Valette, était construite sur une péninsule insérée entre le port principal (Grand Harbour) et le port de Marsamxett.
La cité se présentait selon une disposition typique des villes Méditerranéennes. Il s'agissait d'un enchevêtrement de petites rues étroites et de placettes ombragées.
Les maisons extérieurement austères, étaient construites à l'aide de blocs de pierres particulièrement résistants. Ces murs épais, comme nous le verrons un peu plus loin, auront leur importance lors des bombardements massifs menés par les appareils de l'Axe.
Tous, des Phéniciens en passant par les Carthaginois, les Romains, les Byzantins, les Arabes qui y installèrent un marché aux esclaves, les Normands, les Espagnols de Charles-Quint, les Turcs jusqu'à Bonaparte (lors de sa campagne d'Egypte), ont appris à ne pas sous-estimer la valeur stratégique de cette île.
Malte est ainsi passée aux mains des Anglais en 1800, victorieux des troupes françaises de Vaubois, laissées en garnison par Bonaparte en 1798.
L'occupation de l'île par l'Empire Britannique fut officialisée en 1815, dans le cadre d'un traité passé entre l'Ordre de Malte (apparu en 1530) et Londres.
Qui tient Malte contrôle le détroit de Sicile (peu profond et aisé à miner) et peut donc couper les lignes de communication entre l'Italie et l'Afrique du Nord. Avec Gibraltar et Alexandrie, Malte est l'un des atouts majeur de la Grande-Bretagne en Méditerranée.
Géographiquement et militairement l'île est un bastion qui semble inexpugnable.
Paradoxalement, en 1939, les stratèges de l'Amirauté britannique envisagent très sérieusement d'abandonner la place en cas de guerre contre l'Italie ! Car si la Royal Navy est la troisième flotte du monde, elle n'a pourtant pas les moyens de se maintenir en Méditerranée centrale, tout en protégeant Gibraltar et le Canal de Suez.
De plus Malte est une île qui n'est absolument pas autosuffisante. La population ainsi que la garnison sont tributaires du ravitaillement amené par voie maritime ; ce qui en temps de paix est routinier, deviendra vite un problème majeur pour la survie de l'île qui sera l'objet d'une lutte acharnée pendant plus de deux ans.
En 1940, la base navale de Grand Harbour n'abrite que quelques unités de la Royal Navy ainsi que des vedettes rapides. Sept sous-marins sont basés au port militaire de Manoel Island. En terme de défense antiaérienne, la situation est à peine croyable !
Malte compte deux bases principales : l'aérodrome de Luqa qui abrite les appareils de la Royal air Force et le terrain d'Hal Far, base de la F.A.A. (F.A.A. pour Fleet Air Arm - Aéronavale britannique). Une troisième base, Takali hébergera les Spitfires qui rejoindront l'île en 1942.
Saint-Paul's bay en 1937 - Au fond, les HMS PENELOPE et LANCE.
Notez la barque typiquement maltaise.
Si les infrastructures sont de relativement bonne qualité, le nombre d'appareils frise le ridicule ! Ainsi les hydravions Saro London du No.202 Squadron de la Fleet Air Arm ont quitté l'île en septembre 1939 pour rejoindre Gibraltar.
Il ne reste plus sur place que quelques vieux avions-torpilleurs Swordfish du No.830 Squadron.
Pire ! Malte ne dispose d'aucun appareil de chasse jusqu'en avril 1940, date à laquelle on découvre huit chasseurs Gloster Sea Gladiator, démontés et conditionnés dans leurs caisses.
Mais si les avions sont remis en état, il faudra à l'état-major «faire les fonds de tiroirs» pour dégoter sept pilotes aptes à prendre l'air !
En ce qui concerne la D.C.A. le constat est tout aussi alarmant ! Londres avait prévu 172 canons pour la défense de Malte, en réalité, la garnison ne dispose que de quelques dizaines de fusils mitrailleurs Bren.
Dossier de Campagne
- JG27_Catsy
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Re: Dossier de Campagne
Chapitre 1 - La bataille de Malte, 1940 : la menace italienne
Situation stratégique en Méditerranée centrale en juillet 1940 :
Les bases aériennes maltaises :
Les aérodromes italiens en Sicile :
Au moment du déclenchement de la guerre, Malte est une possession anglaise depuis près de cent cinquante ans. Sa situation en fait une cible toute désignée des ambitions méditerranéennes de Mussolini, qui s’efforce de mettre l’île à genoux.
Au début de la guerre, Malte semble devoir rester à l’écart des théâtres d’opérations. Mais l’entrée en guerre de l’Italie change la donne. Mussolini ne fait pas mystère de son désir d’annexer l’île. Moins de vingt-quatre heures après l’ouverture des hostilités, 100 avions italiens bombardent les docks de La Valette.
Les défenses anti-aériennes de l’île sont insuffisantes et l’aviation aligne une force symbolique de 3 chasseurs biplans Gloster Gladiator, surnommés « Foi », « Espérance » et « Charité » – même si quelques Hurricane et d’autres appareils furent envoyés en renfort au fil des mois.
On peut considérer rétrospectivement le fait de n'avoir pas fourni à Malte les moyens de défense et d'attaque nécessaires comme l'une des erreurs les plus lourdes de conséquences de la politique défensive britannique d'avant guerre.
Il y avait là une île dotée de rades et d'installations portuaires magnifiques, une forteresse insubmersible située en un point stratégique de la Méditerranée centrale, un relais vital entre les deux bases les plus proches, Gibraltar et Alexandrie, situées l'une et l'autre à quelque quinze cents kilomètres.
L'île, dont les dimensions n'excèdent guère 25 kilomètres sur 13, possède des cavernes naturelles et des grottes qui eussent fait un remarquable dépôt de vivres, d'équipement, de mazout et de munitions, et permis de soutenir un long siège. Signalons enfin qu'à l'époque Malte comptait environ 280 000 habitants.
Sa proximité avec la Sicile et le continent italien rendait très probable une attaque aérienne directe et un blocus naval si l'Italie décidait d'entrer en guerre aux côtés de l'Allemagne, éventualité qu'il fallait bien envisager depuis la création de l'Axe Berlin-Rome, et spécialement après 1937. A cette époque, le contrôle radar en matière de défense aérienne en était encore à un stade embryonnaire. II ne semblait pas alors qu'on pût efficacement contrer les attaques convergentes des escadrilles aériennes impressionnantes et tant vantées de Mussolini. Aussi les plans de réarmements britanniques, révisés en toute hâte après la crise de Munich en septembre 1938, n'envisageaient-ils aucune défense sérieuse de l'île.
A - Malte à l'abandon
Canon anti-aérien Bofors de 40 mm
La décision de ne pas défendre Malte reflète le point de vue qui prédominait alors au comité des chefs d'état-major de l'armée en général et à la R.A.F. en particulier, et que ne partageaient qu'avec réticence l'Amirauté et l'amiral sir Andrew Cunningham, commandant en chef de la flotte de la Méditerranée. Quand la guerre menaça d'éclater, la flotte gagna le port d'Alexandrie, en Egypte, qui devait rester sa base principale, tout au moins pendant la première moitié de la guerre.
Le 3 septembre 1939, les forces navales mouillées à Malte ne se composaient que de sept sous-marins, de douze torpilleurs avec leurs ravitailleurs et de quelques dragueurs de mines.
Les défenses terrestres de l'île se résumaient à quelques batteries légères antiaériennes et aux batteries défensives de Grand Harbour.
Position anti-aérienne dans les rochers maltais
L'armée de terre n'était représentée que par quatre bataillons d'infanterie britanniques et un bataillon maltais nouvellement constitué. Aucun avion n'était basé sur les trois aérodromes sans défense ; les seuls appareils disponibles étaient quatre Gladiator en caisses, appareils de rechange destinés à un porte-avions alors en Grande-Bretagne !
L'Italie étant restée ostensiblement neutre pendant les premiers mois de la guerre, l'amiral Cunningham accepta la suggestion de l'Amirauté tendant à affecter provisoirement ses cuirassés et ses croiseurs dans des secteurs plus intéressants et, quand l'amiral regagna son Q.G. de Malte, en novembre, il ne commandait plus qu'une flotte méditerranéenne considérablement réduite.
Le mois de mars 1940 vit la fin de la «drôle de guerre» qui avait épargné à la fois Malte et les îles Britanniques.
Cunningham, de retour à Alexandrie, hissa alors sa marque sur le cuirassé Warspite, qui, avec trois autres cuirassés, cinq croiseurs, un porte-avions et un certain nombre de destroyers et de sous-marins, formait la flotte reconstituée de la Méditerranée. La Méditerranée était déjà fermée aux navires commerciaux isolés à l'exception toutefois des convois escortés de troupes et de vivres destinés au Moyen-Orient.
B - Le Duce veut Malte
Des bombardiers italiens en route pour bombarder Malte
La campagne éclair menée par l'Allemagne en France et l'évacuation des forces anglaises et françaises à Dunkerque convainquirent Mussolini qu'il était temps d'entrer en guerre et de réclamer une part du butin tentant que laissait présager la défaite imminente de la France et de la Grande-Bretagne.
Dans la nuit du 10 juin, l'Italie déclara la guerre à ces deux pays et quelques heures plus tard des avions s'envolèrent de Sicile et larguèrent leur premier chargement de bombes sur Malte. Escortés par les chasseurs Macchi C.200 du 6e Gruppo Autonomo, les Savoia-Marchetti S.79 du 34e Stormo bombardent l'aérodrome de Hal Far.
Une vingtaine d'appareils des 34e et 11e Stormo s'en prennent aussi à l'arsenal de Burmola, tandis que les S.79 du 41e Stormo attaquent la base des hydravions de Kalafrana. Les raids se succèdent ... La garnison ne peut alors opposer que quatre vieux biplans Sea Gloster Gladiator :
- « Foi » (n°5520),
- « Espérance » (n°5531),
- « Charité » (n°5519)
- et l'appareil portant le numéro 5524.
Ce fut le début pour les insulaires et leurs défenseurs d'une épreuve qui devait durer, avec une intensité variable, près de trois ans.
Le brigadier sir William Dobbie, gouverneur-commandant en chef de Malte à cette époque, avait prévu l'initiative italienne, pris quelques indispensables mesures de précaution - l'organisation de la défense des aérodromes, par exemple - et demandé à la population maltaise de se disperser pendant les raids et de chercher refuge dans les cavernes et les abris rocheux.
L'un des 3 biplans britanniques dont Malte disposait en début de guerre
Des quatre Gladiator qui avaient été sortis des caisses et assemblés, l'un s'écrasa au sol et, pendant quelque temps, les trois appareils restants constituèrent l'unique couverture aérienne de l'île. La conscription fut décrétée pour les Maltais valides et deux régiments locaux d'artillerie et d'infanterie furent formés.
Le premier jour des hostilités, le 11 juin, il y eut en l'espace de douze heures huit attaques d'une extrême violence, sur l'aérodrome et l'arsenal maritime, mais l'arsenal et deux vaisseaux de guerre répondirent par un tir de D.C.A. et abattirent trois appareils ennemis. Les bombes - moins grosses qu'on ne l'avait craint - tuèrent vingt-trois civils et sept soldats.
Deux jours plus tard, il y eut huit nouveaux raids. On compta d'ailleurs une trentaine d'alertes au cours de la première semaine. Les Maltais s'habituèrent vite à ce genre de bombardement à outrance qui devait durer des semaines.
Juste avant l'effondrement de la France, le 24 juin, neuf Swordfish de la 830e escadrille de l'Aéronavale, partis du sud de la France, atteignirent Malte pour venir apporter une aide désespérément urgente.
C - Douze Hurricane sains et saufs
Le 28 juin, pour boucher le vide laissé par la défection de la flotte française - jusque-là responsable de l'ouest du bassin méditerranéen - la Force H se constitua en hâte à Gibraltar.
Placée sous les ordres de l'amiral sir James Somerville, elle comprenait le croiseur de bataille Hood, les cuirassés Revolution et Valiant, le porte-avions Ark Royal, deux croiseurs et onze destroyers. Elle était d'une importance essentielle pour Malte, qui dépendait maintenant entièrement, pour son ravitaillement, de convois partis de bases lointaines et qui devaient traverser des eaux vraisemblablement sous contrôle ennemi dans un proche avenir.
Les ateliers du porte-avions HMS Argus
Bien que les chasseurs qui défendaient la Grande-Bretagne fussent soumis à rude épreuve par les attaques de la Luftwaffe et l'invasion apparemment imminente, les chefs d'état-major comprirent qu'il fallait faire quelque chose pour renforcer la couverture aérienne de Malte, comme ne cessait de le réclamer Cunningham. Mais leur contribution à la défense de l'île demeura des plus faibles.
Début août, le vieux porte-avions d'entraînement Argus quitta l'Angleterre à destination de la Méditerranée avec, à son bord, douze Hurricane qui décollèrent d'un point situé au sud-ouest de la Sardaigne et atterrirent sains et saufs à Malte le 12 août. C'était la seule façon d'envoyer des chasseurs sur l'île, et l'opération allait d'ailleurs se répéter à maintes reprises, parfois dans des conditions bien plus dangereuses.
Un mois plus tard, lorsque le nouveau porte-avions lllustrious, le cuirassé Valiant et deux croiseurs antiaériens passèrent en Méditerranée pour aller renforcer la flotte d'Alexandrie, on profita de l'occasion pour envoyer des vivres et du matériel à Malte. D'autres convois, partis d'Alexandrie cette fois, touchèrent l'île en octobre et en novembre.
Les raids se poursuivent implacablement jusqu'au mois d'octobre 1940, obligeant l'Amirauté britannique a retiré le gros des bâtiments de la Navy. Seuls restent à Grand Harbour, quelques vieux destroyers, sous-marins et chasseurs de mines.
D - Batailles navales
Entre temps, la marine italienne mène au large de l'île, d'août à septembre 1940, une intense campagne de mouillage de mines. Le premier barrage est posé le 23 août entre la Sicile et Malte. Ces mines provoquent la destruction du destroyer HMS Hostile parti de Malte et naviguant vers Gibraltar.
Dans la nuit du 05 au 06 septembre, une flottille de 4 torpilleurs italiens (Altair, Alcione, Ariel et Arctusa), aux ordres du commandant Del Cima, mouille un total de 224 mines au Nord-ouest et Sud-est de Malte. Moins d'un mois plus tard, c'est la flottille n°14 de destroyers, commandée par le Capitaine Galati, qui dresse un barrage de 174 mines au Sud de l'île.
L'objectif des Italiens est simple : isoler puis assiéger Malte en compliquant son ravitaillement. Cela étant, l'invasion italienne ne vient pas.
Les Britanniques ont le temps de fortifier les points forts de l'endroit et de ravitailler Malte en octobre ; et le Duce de penser que l'Angleterre aura capitulé bien assez tôt et que Malte tombera entre ses mains comme un fruit mur.
Swordfish birtanniques volant vers le port de Tarente
Le 10 novembre 1940, une flotte composée du cuirassé HMS Barham, des croiseurs Glasgow et Berwick et de 6 destroyers parvient à débarquer à Malte 2 000 hommes ainsi que des canons anitaériens de 40mm Bofors.
Le soir même, dans la nuit du 11 au 12 novembre 1940, 20 Fairey Swordfish de la Fleet Air Arm britannique décollant du porte-avions Illustrious se rappellent au bon souvenir du dictateur italien en torpillant trois cuirassés au mouillage dans le port de Tarente.
Les dégâts sont lourds : le Conte di Cavour est coulé et ne reprendra plus jamais la mer, le Littorio et le Caio Duilio sont quant à eux immobilisés pendant plusieurs mois. Deux croiseurs sont aussi touchés. A noter que l'efficace reconnaissance photographique de Tarente effectuée par des appareils Glenn-Martin venus de Malte joua un rôle important dans le succès de l'attaque.
Dès lors, il parut moins risqué d'envoyer à Alexandrie les hommes, les armes, et les blindés qui faisaient cruellement défaut.
Mais ce coup d'éclat anglais n'empêcha pas l'aviation italienne de poursuivre ses bombardements sur Malte. En mer la situation n'est guère meilleure; le convoi anglais « Collar », parti de Gibraltar pour Malte et Alexandrie, est attaqué par la flotte italienne au large du cap Spartivento. Le croiseur HMS Berwick est fortement endommagé par un cuirassé italien. Cependant, cette rencontre se termina par le repli des Italiens et les navires marchands arrivèrent sains et saufs à Malte et à Alexandrie.
Un autre convoi, en provenance d'Alexandrie cette fois, atteignit Malte un peu avant la fin de l'année. Cunningham, comme toujours à la tête de la force de couverture, profita de l'occasion pour visiter l'île. Encore qu'il ait pu noter que les défenses s'étaient bien améliorées depuis son dernier passage, huit mois plus tôt, il fut loin d'être satisfait.
Sur Malte, dans les rangs des pilotes britanniques, l'érosion est très forte. Les hommes sont épuisés et le matériel souffre de cet état d'alerte permanent. Le 17 novembre, un nouveau Squadron de 12 Hurricane décolle du porte-avions HMS Argus afin de renforcer les bases Maltaises. Mais les appareils rencontrent de violents vents contraires sur leur route de plus de 600 km. Huit chasseurs s'abîment en mer, réservoirs à sec !
Seuls quatre Hurricane parviennent à se poser à Malte in extremis. Cet échec est retentissant et le morale des Maltais s'en ressent fortement. En décembre ce sont 16 bombardiers moyens Vickers Wellington qui se posent à Luqa pour accroître la dimension offensive de l'île.
Les Anglais semblent être en passe de remporter leur bras de fer contre Mussolini ... mais c'est sans compter avec les appareils allemands.
E - Nouveaux chevaliers de Malte
Les six premiers mois des hostilités avaient montré que le rôle de Malte était plus important que jamais en tant que base pour des opérations menées par des forces de surface légères, des sous-marins et des avions contre la route des convois italiens à destination de la Libye.
L'île demeurait pourtant trop vulnérable encore pour que des croiseurs et des destroyers pussent utiliser son port de façon régulière. D'autre part, les sous-marins plus anciens qui continuaient d'être basés dans l'île avaient un tonnage trop important pour pouvoir agir sur la route des convois ennemis dans les eaux peu profondes d'Afrique du Nord, à l'est de Tripoli.
Ils furent peu à peu remplacés par des submersibles plus petits, des classes Unity et Triton, qui allaient bientôt démontrer leur efficacité.
La couverture aérienne de Malte restait terriblement insuffisante. Fin 1940, elle comprenait seulement 15 Hurricane, 12 Swordfish (torpilleurs-bombardiers), 16 Wellington de la R.A.F., 4 hydravions Sunderland et 4 appareils de reconnaissance Glenn-Martin. L'effectif des chasseurs était donc bien loin d'atteindre les quatre escadrilles prévues, tandis que les avions d'observation demeuraient incapables de surveiller en permanence les mouvements des navires marchands italiens.
Il n'est donc pas surprenant qu'entre juin et décembre 1940, les Italiens aient envoyé en Libye 69 000 tonnes de matériel et de vivres, avec seulement 2 ou 3% de pertes, et quelque 47 000 hommes qui arrivèrent tous sains et saufs à destination.
Tout bien considéré pourtant, la situation générale dans le bassin méditerranéen n'était pas si mauvaise. Dans le désert occidental, le général Wavell avait récemment mis en déroute l'armée italienne. La mainmise britannique sur la Crète et l'usage subséquent de la baie de la Sude comme base avancée avaient permis à Cunningham de contrôler la Méditerranée orientale.
L'amiral, ayant d'autre part affirmé sa suprématie sur la flotte italienne, se trouvait en mesure de dégarnir en partie le bassin central pour couvrir la marche des convois indispensables : courant décembre, la Royal Navy escorta sans incident cinquante-cinq navires dans le détroit de Sicile. En outre les bombardiers italiens ne se révélèrent pas aussi dangereux qu'on l'avait craint. Malte avait résisté à leurs attaques et ferait sans doute mieux encore, une fois les renforts arrivés.
Situation stratégique en Méditerranée centrale en juillet 1940 :
Les bases aériennes maltaises :
Les aérodromes italiens en Sicile :
Au moment du déclenchement de la guerre, Malte est une possession anglaise depuis près de cent cinquante ans. Sa situation en fait une cible toute désignée des ambitions méditerranéennes de Mussolini, qui s’efforce de mettre l’île à genoux.
Au début de la guerre, Malte semble devoir rester à l’écart des théâtres d’opérations. Mais l’entrée en guerre de l’Italie change la donne. Mussolini ne fait pas mystère de son désir d’annexer l’île. Moins de vingt-quatre heures après l’ouverture des hostilités, 100 avions italiens bombardent les docks de La Valette.
Les défenses anti-aériennes de l’île sont insuffisantes et l’aviation aligne une force symbolique de 3 chasseurs biplans Gloster Gladiator, surnommés « Foi », « Espérance » et « Charité » – même si quelques Hurricane et d’autres appareils furent envoyés en renfort au fil des mois.
On peut considérer rétrospectivement le fait de n'avoir pas fourni à Malte les moyens de défense et d'attaque nécessaires comme l'une des erreurs les plus lourdes de conséquences de la politique défensive britannique d'avant guerre.
Il y avait là une île dotée de rades et d'installations portuaires magnifiques, une forteresse insubmersible située en un point stratégique de la Méditerranée centrale, un relais vital entre les deux bases les plus proches, Gibraltar et Alexandrie, situées l'une et l'autre à quelque quinze cents kilomètres.
L'île, dont les dimensions n'excèdent guère 25 kilomètres sur 13, possède des cavernes naturelles et des grottes qui eussent fait un remarquable dépôt de vivres, d'équipement, de mazout et de munitions, et permis de soutenir un long siège. Signalons enfin qu'à l'époque Malte comptait environ 280 000 habitants.
Sa proximité avec la Sicile et le continent italien rendait très probable une attaque aérienne directe et un blocus naval si l'Italie décidait d'entrer en guerre aux côtés de l'Allemagne, éventualité qu'il fallait bien envisager depuis la création de l'Axe Berlin-Rome, et spécialement après 1937. A cette époque, le contrôle radar en matière de défense aérienne en était encore à un stade embryonnaire. II ne semblait pas alors qu'on pût efficacement contrer les attaques convergentes des escadrilles aériennes impressionnantes et tant vantées de Mussolini. Aussi les plans de réarmements britanniques, révisés en toute hâte après la crise de Munich en septembre 1938, n'envisageaient-ils aucune défense sérieuse de l'île.
A - Malte à l'abandon
Canon anti-aérien Bofors de 40 mm
La décision de ne pas défendre Malte reflète le point de vue qui prédominait alors au comité des chefs d'état-major de l'armée en général et à la R.A.F. en particulier, et que ne partageaient qu'avec réticence l'Amirauté et l'amiral sir Andrew Cunningham, commandant en chef de la flotte de la Méditerranée. Quand la guerre menaça d'éclater, la flotte gagna le port d'Alexandrie, en Egypte, qui devait rester sa base principale, tout au moins pendant la première moitié de la guerre.
Le 3 septembre 1939, les forces navales mouillées à Malte ne se composaient que de sept sous-marins, de douze torpilleurs avec leurs ravitailleurs et de quelques dragueurs de mines.
Les défenses terrestres de l'île se résumaient à quelques batteries légères antiaériennes et aux batteries défensives de Grand Harbour.
Position anti-aérienne dans les rochers maltais
L'armée de terre n'était représentée que par quatre bataillons d'infanterie britanniques et un bataillon maltais nouvellement constitué. Aucun avion n'était basé sur les trois aérodromes sans défense ; les seuls appareils disponibles étaient quatre Gladiator en caisses, appareils de rechange destinés à un porte-avions alors en Grande-Bretagne !
L'Italie étant restée ostensiblement neutre pendant les premiers mois de la guerre, l'amiral Cunningham accepta la suggestion de l'Amirauté tendant à affecter provisoirement ses cuirassés et ses croiseurs dans des secteurs plus intéressants et, quand l'amiral regagna son Q.G. de Malte, en novembre, il ne commandait plus qu'une flotte méditerranéenne considérablement réduite.
Le mois de mars 1940 vit la fin de la «drôle de guerre» qui avait épargné à la fois Malte et les îles Britanniques.
Cunningham, de retour à Alexandrie, hissa alors sa marque sur le cuirassé Warspite, qui, avec trois autres cuirassés, cinq croiseurs, un porte-avions et un certain nombre de destroyers et de sous-marins, formait la flotte reconstituée de la Méditerranée. La Méditerranée était déjà fermée aux navires commerciaux isolés à l'exception toutefois des convois escortés de troupes et de vivres destinés au Moyen-Orient.
B - Le Duce veut Malte
Des bombardiers italiens en route pour bombarder Malte
La campagne éclair menée par l'Allemagne en France et l'évacuation des forces anglaises et françaises à Dunkerque convainquirent Mussolini qu'il était temps d'entrer en guerre et de réclamer une part du butin tentant que laissait présager la défaite imminente de la France et de la Grande-Bretagne.
Dans la nuit du 10 juin, l'Italie déclara la guerre à ces deux pays et quelques heures plus tard des avions s'envolèrent de Sicile et larguèrent leur premier chargement de bombes sur Malte. Escortés par les chasseurs Macchi C.200 du 6e Gruppo Autonomo, les Savoia-Marchetti S.79 du 34e Stormo bombardent l'aérodrome de Hal Far.
Une vingtaine d'appareils des 34e et 11e Stormo s'en prennent aussi à l'arsenal de Burmola, tandis que les S.79 du 41e Stormo attaquent la base des hydravions de Kalafrana. Les raids se succèdent ... La garnison ne peut alors opposer que quatre vieux biplans Sea Gloster Gladiator :
- « Foi » (n°5520),
- « Espérance » (n°5531),
- « Charité » (n°5519)
- et l'appareil portant le numéro 5524.
Ce fut le début pour les insulaires et leurs défenseurs d'une épreuve qui devait durer, avec une intensité variable, près de trois ans.
Le brigadier sir William Dobbie, gouverneur-commandant en chef de Malte à cette époque, avait prévu l'initiative italienne, pris quelques indispensables mesures de précaution - l'organisation de la défense des aérodromes, par exemple - et demandé à la population maltaise de se disperser pendant les raids et de chercher refuge dans les cavernes et les abris rocheux.
L'un des 3 biplans britanniques dont Malte disposait en début de guerre
Des quatre Gladiator qui avaient été sortis des caisses et assemblés, l'un s'écrasa au sol et, pendant quelque temps, les trois appareils restants constituèrent l'unique couverture aérienne de l'île. La conscription fut décrétée pour les Maltais valides et deux régiments locaux d'artillerie et d'infanterie furent formés.
Le premier jour des hostilités, le 11 juin, il y eut en l'espace de douze heures huit attaques d'une extrême violence, sur l'aérodrome et l'arsenal maritime, mais l'arsenal et deux vaisseaux de guerre répondirent par un tir de D.C.A. et abattirent trois appareils ennemis. Les bombes - moins grosses qu'on ne l'avait craint - tuèrent vingt-trois civils et sept soldats.
Deux jours plus tard, il y eut huit nouveaux raids. On compta d'ailleurs une trentaine d'alertes au cours de la première semaine. Les Maltais s'habituèrent vite à ce genre de bombardement à outrance qui devait durer des semaines.
Juste avant l'effondrement de la France, le 24 juin, neuf Swordfish de la 830e escadrille de l'Aéronavale, partis du sud de la France, atteignirent Malte pour venir apporter une aide désespérément urgente.
C - Douze Hurricane sains et saufs
Le 28 juin, pour boucher le vide laissé par la défection de la flotte française - jusque-là responsable de l'ouest du bassin méditerranéen - la Force H se constitua en hâte à Gibraltar.
Placée sous les ordres de l'amiral sir James Somerville, elle comprenait le croiseur de bataille Hood, les cuirassés Revolution et Valiant, le porte-avions Ark Royal, deux croiseurs et onze destroyers. Elle était d'une importance essentielle pour Malte, qui dépendait maintenant entièrement, pour son ravitaillement, de convois partis de bases lointaines et qui devaient traverser des eaux vraisemblablement sous contrôle ennemi dans un proche avenir.
Les ateliers du porte-avions HMS Argus
Bien que les chasseurs qui défendaient la Grande-Bretagne fussent soumis à rude épreuve par les attaques de la Luftwaffe et l'invasion apparemment imminente, les chefs d'état-major comprirent qu'il fallait faire quelque chose pour renforcer la couverture aérienne de Malte, comme ne cessait de le réclamer Cunningham. Mais leur contribution à la défense de l'île demeura des plus faibles.
Début août, le vieux porte-avions d'entraînement Argus quitta l'Angleterre à destination de la Méditerranée avec, à son bord, douze Hurricane qui décollèrent d'un point situé au sud-ouest de la Sardaigne et atterrirent sains et saufs à Malte le 12 août. C'était la seule façon d'envoyer des chasseurs sur l'île, et l'opération allait d'ailleurs se répéter à maintes reprises, parfois dans des conditions bien plus dangereuses.
Un mois plus tard, lorsque le nouveau porte-avions lllustrious, le cuirassé Valiant et deux croiseurs antiaériens passèrent en Méditerranée pour aller renforcer la flotte d'Alexandrie, on profita de l'occasion pour envoyer des vivres et du matériel à Malte. D'autres convois, partis d'Alexandrie cette fois, touchèrent l'île en octobre et en novembre.
Les raids se poursuivent implacablement jusqu'au mois d'octobre 1940, obligeant l'Amirauté britannique a retiré le gros des bâtiments de la Navy. Seuls restent à Grand Harbour, quelques vieux destroyers, sous-marins et chasseurs de mines.
D - Batailles navales
Entre temps, la marine italienne mène au large de l'île, d'août à septembre 1940, une intense campagne de mouillage de mines. Le premier barrage est posé le 23 août entre la Sicile et Malte. Ces mines provoquent la destruction du destroyer HMS Hostile parti de Malte et naviguant vers Gibraltar.
Dans la nuit du 05 au 06 septembre, une flottille de 4 torpilleurs italiens (Altair, Alcione, Ariel et Arctusa), aux ordres du commandant Del Cima, mouille un total de 224 mines au Nord-ouest et Sud-est de Malte. Moins d'un mois plus tard, c'est la flottille n°14 de destroyers, commandée par le Capitaine Galati, qui dresse un barrage de 174 mines au Sud de l'île.
L'objectif des Italiens est simple : isoler puis assiéger Malte en compliquant son ravitaillement. Cela étant, l'invasion italienne ne vient pas.
Les Britanniques ont le temps de fortifier les points forts de l'endroit et de ravitailler Malte en octobre ; et le Duce de penser que l'Angleterre aura capitulé bien assez tôt et que Malte tombera entre ses mains comme un fruit mur.
Swordfish birtanniques volant vers le port de Tarente
Le 10 novembre 1940, une flotte composée du cuirassé HMS Barham, des croiseurs Glasgow et Berwick et de 6 destroyers parvient à débarquer à Malte 2 000 hommes ainsi que des canons anitaériens de 40mm Bofors.
Le soir même, dans la nuit du 11 au 12 novembre 1940, 20 Fairey Swordfish de la Fleet Air Arm britannique décollant du porte-avions Illustrious se rappellent au bon souvenir du dictateur italien en torpillant trois cuirassés au mouillage dans le port de Tarente.
Les dégâts sont lourds : le Conte di Cavour est coulé et ne reprendra plus jamais la mer, le Littorio et le Caio Duilio sont quant à eux immobilisés pendant plusieurs mois. Deux croiseurs sont aussi touchés. A noter que l'efficace reconnaissance photographique de Tarente effectuée par des appareils Glenn-Martin venus de Malte joua un rôle important dans le succès de l'attaque.
Dès lors, il parut moins risqué d'envoyer à Alexandrie les hommes, les armes, et les blindés qui faisaient cruellement défaut.
Mais ce coup d'éclat anglais n'empêcha pas l'aviation italienne de poursuivre ses bombardements sur Malte. En mer la situation n'est guère meilleure; le convoi anglais « Collar », parti de Gibraltar pour Malte et Alexandrie, est attaqué par la flotte italienne au large du cap Spartivento. Le croiseur HMS Berwick est fortement endommagé par un cuirassé italien. Cependant, cette rencontre se termina par le repli des Italiens et les navires marchands arrivèrent sains et saufs à Malte et à Alexandrie.
Un autre convoi, en provenance d'Alexandrie cette fois, atteignit Malte un peu avant la fin de l'année. Cunningham, comme toujours à la tête de la force de couverture, profita de l'occasion pour visiter l'île. Encore qu'il ait pu noter que les défenses s'étaient bien améliorées depuis son dernier passage, huit mois plus tôt, il fut loin d'être satisfait.
Sur Malte, dans les rangs des pilotes britanniques, l'érosion est très forte. Les hommes sont épuisés et le matériel souffre de cet état d'alerte permanent. Le 17 novembre, un nouveau Squadron de 12 Hurricane décolle du porte-avions HMS Argus afin de renforcer les bases Maltaises. Mais les appareils rencontrent de violents vents contraires sur leur route de plus de 600 km. Huit chasseurs s'abîment en mer, réservoirs à sec !
Seuls quatre Hurricane parviennent à se poser à Malte in extremis. Cet échec est retentissant et le morale des Maltais s'en ressent fortement. En décembre ce sont 16 bombardiers moyens Vickers Wellington qui se posent à Luqa pour accroître la dimension offensive de l'île.
Les Anglais semblent être en passe de remporter leur bras de fer contre Mussolini ... mais c'est sans compter avec les appareils allemands.
E - Nouveaux chevaliers de Malte
Les six premiers mois des hostilités avaient montré que le rôle de Malte était plus important que jamais en tant que base pour des opérations menées par des forces de surface légères, des sous-marins et des avions contre la route des convois italiens à destination de la Libye.
L'île demeurait pourtant trop vulnérable encore pour que des croiseurs et des destroyers pussent utiliser son port de façon régulière. D'autre part, les sous-marins plus anciens qui continuaient d'être basés dans l'île avaient un tonnage trop important pour pouvoir agir sur la route des convois ennemis dans les eaux peu profondes d'Afrique du Nord, à l'est de Tripoli.
Ils furent peu à peu remplacés par des submersibles plus petits, des classes Unity et Triton, qui allaient bientôt démontrer leur efficacité.
La couverture aérienne de Malte restait terriblement insuffisante. Fin 1940, elle comprenait seulement 15 Hurricane, 12 Swordfish (torpilleurs-bombardiers), 16 Wellington de la R.A.F., 4 hydravions Sunderland et 4 appareils de reconnaissance Glenn-Martin. L'effectif des chasseurs était donc bien loin d'atteindre les quatre escadrilles prévues, tandis que les avions d'observation demeuraient incapables de surveiller en permanence les mouvements des navires marchands italiens.
Il n'est donc pas surprenant qu'entre juin et décembre 1940, les Italiens aient envoyé en Libye 69 000 tonnes de matériel et de vivres, avec seulement 2 ou 3% de pertes, et quelque 47 000 hommes qui arrivèrent tous sains et saufs à destination.
Tout bien considéré pourtant, la situation générale dans le bassin méditerranéen n'était pas si mauvaise. Dans le désert occidental, le général Wavell avait récemment mis en déroute l'armée italienne. La mainmise britannique sur la Crète et l'usage subséquent de la baie de la Sude comme base avancée avaient permis à Cunningham de contrôler la Méditerranée orientale.
L'amiral, ayant d'autre part affirmé sa suprématie sur la flotte italienne, se trouvait en mesure de dégarnir en partie le bassin central pour couvrir la marche des convois indispensables : courant décembre, la Royal Navy escorta sans incident cinquante-cinq navires dans le détroit de Sicile. En outre les bombardiers italiens ne se révélèrent pas aussi dangereux qu'on l'avait craint. Malte avait résisté à leurs attaques et ferait sans doute mieux encore, une fois les renforts arrivés.
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Re: Dossier de Campagne
Chapitre 2 - La bataille de Malte, 1941 : La Luftwaffe entre dans la partie
A - Les Allemands en Méditerranée
La Luftwaffe entre dans la partie
C'est alors que se produisit un de ces tournants imprévisibles et lourds de conséquences comme il en arrive en temps de guerre : de puissantes forces terrestres et aériennes allemandes apparurent soudainement dans le bassin méditerranéen. C'était la première manifestation du mécontentement de Hitler à propos de la façon dont les Italiens menaient leur guerre en Grèce et en Afrique du Nord. Le 8 janvier, les aérodromes de Sicile étaient couverts d'appareils allemands : 96 bombardiers et 25 chasseurs bimoteurs appartenant au 10 C.A. aérien, unité d'élite de la Luftwaffe, dont les effectifs totaux atteignaient 120 bombardiers, 150 Junkers 87 Stuka, 40 chasseurs et 20 appareils de reconnaissance.
Désormais, le 10 C.A. aérien allemand devait, en priorité, empêcher Malte de servir de base aux forces navales et aériennes britanniques, pour protéger les convois de l'Axe destinés à la Libye. Il devait également attaquer les lignes de communication maritimes anglaises avec l'Egypte et assurer la couverture des armées de l'Axe en Afrique du Nord.
Les Italiens possédant déjà en Sicile quelque 45 bombardiers et 75 chasseurs, outre un assez grand nombre d'appareils en Sardaigne, les navires de guerre et de commerce britanniques qui devraient passer en Méditerranée centrale allaient, à n'en pas douter, subir des attaques intensives. Mis à part les quelques avions embarqués qui pouvaient parfois se trouver disponibles dans ces eaux, les 15 Hurricane de la R.A.F. stationnés à Malte étaient les seuls chasseurs en mesure d'assurer une couverture aérienne, avec dix-huit appareils du même type qui arrivèrent sur l'île avec le premier convoi.
Malte entra dès lors dans la première phase d'une longue lutte pour la vie, une lutte qui allait mettre à rude épreuve le courage et l'endurance de ses défenseurs et des civils.
B - Feu sur l'Illustrious
Le convoi Excess
L'opération Excess - envoi d'un convoi particulièrement important - engagea toutes les forces maritimes disponibles d'un bout à l'autre de la Méditerranée et réussit à donner quelque répit à l'île. Le 8 janvier 1941, Malte reçut en renfort 500 soldats et aviateurs venus d'Alexandrie à bord des croiseurs Gloucester et Southampton.
Un des bâtiments de l'opération Excess venus de l'ouest, l'Essex, entra à Grand Harbour avec 4 000 tonnes de munitions, 3 000 tonnes de pommes de terre et 12 Hurricane, tandis qu'un autre débarquait 800 soldats.
Dans la nuit du 12 janvier, les Wellington basés à Malte attaquèrent l'aérodrome de Catane, mais ce n'était que l'un des nombreux terrains siciliens utilisés par le 10 C.A. aérien. Dans l'intervalle, un bâtiment qui constituait un important objectif pour la Luftwaffe était entré au port de La Valette.
Il s'agissait du porte-avions lllustrious, auquel des Stuka stationnés en Sicile avaient infligé de sérieuses avaries, et qui s'était traîné jusqu'à Malte, le 10 janvier, pour y être réparé. Le croiseur HMS Southampton est quant à lui mortellement touché et coule le 11 janvier, tandis que son sister-ship, le HMS Gloucester est endommagé par des bombes de 500 kg et 250 kg.
La Luftwaffe prit plusieurs jours de réflexion avant de décider qu'il fallait détruire l'Illustrious, ce qui valut quelque répit à Malte. Puis, le 15 janvier, des appareils de reconnaissance allemands survolèrent Grand Harbour.
L'Illustrious, le premier navire britannique achevé de sa classe
L'Illustrious : les Britanniques adoptent ce qui restera leur credo pour la construction de porte-avions pendant toute la guerre: le pont blindé.
Il devient dès son entrée ne service en 1940 le navire pivot de la Force A, responsable au premier chef de la survie de Malte. Elle va y contribuer puissamment en novembre 1940 en détruisant en une nuit la moitié de la flotte de cuirassés italiens basée à Tarente. Après le capitole, la roche tarpéenne : trois mois plus tard, le navire passe à deux doigts de la destruction en escortant le convoi Excess vers Malte. La bombe d'un des Stuka sera l'un des deux seuls projectiles à percer le pont blindé d'un porte-avions britannique pendant le conflit.
Profitant d'une période de mauvais temps, peu propice aux raids ennemis, les équipes de Malte travaillèrent sans relâche pour remettre en état de naviguer l'Illustrious et lui permettre de quitter Grand Harbour. Dans la nuit du 15 au 16 janvier 1941, la Luftwaffe lance son premier raid sur Malte et parachute des mines acoustiques dans le port de La Valette.
Tout est fait pour que le porte-avions anglais soit détruit. Le 16 une éclaircie permet à pas moins de 80 Junkers 88 et 87, escortés par des chasseurs italiens Fiat CR 42 de passer à l'attaque, attaquant par vagues successives, prenant pour objectif essentiel le porte-avions et l'arsenal.
Les Anglais ne peuvent opposer à ces escadrilles que 4 Hurricanes et 3 Fairey Fulmar. Miraculeusement une seule bombe atteint l'Illustrious ! Si l'lllustrious, malgré la hardiesse des attaques en rase-mottes, ne fut touché qu'une seule fois, l'arsenal, en revanche, subit des dégâts importants.
Des bombes détruisirent des bâtiments officiels, plusieurs églises anciennes et touchèrent le ravitailleur Essex, tuant ou blessant plusieurs dockers. Leurs camarades refusant alors de continuer à décharger le navire, marins et soldats terminèrent la besogne.
Relativement peuplées, les « trois villes » : Senglea, Vittoriosa et Cospicua, dont les habitants avaient perdu peu à peu toute prudence compte tenu de la relative inefficacité des premiers raids italiens, payaient à présent le prix de leur imprévoyance.
Il fallut sortir de nombreux habitants ensevelis sous les débris de leur maison. Près de cent personnes - hommes, femmes et enfants - trouvèrent la mort au cours de cette attaque allemande, la première d'une série dont les habitants se souviennent encore comme de « L'Illustrious Blitz ».
La D.C.A. du porte-avions et des défenses de l'arsenal n'avait pas cessé de tirer. Elle réussit à abattre cinq Stuka, tandis que les chasseurs - trois Fulmar et quatre Hurricane - en abattaient cinq autres.
Le 17 janvier, les Allemands se contentèrent simplement de procéder à des missions de reconnaissance. Le 18, ils attaquèrent surtout les aérodromes de Luka et de Hal-Far, détruisant six appareils au sol et endommageant un grand nombre d'autres.
C'est le lendemain que se déroula le raid le plus violent de la série.
Les Stuka s'en prirent de nouveau à l'Illustrious, qu'ils touchèrent une nouvelle fois. Les civils avaient fort heureusement compris la nécessité de se mettre à l'abri et les pertes en vies humaines furent légères.
Les réparations du porte-avions avaient été menées grand train pour lui permettre de quitter Malte le plus vite possible ; il réussit d'ailleurs à appareiller pour Alexandrie dans la nuit du 23.
Pendant les treize jours qu'il était resté à Malte, il n'avait jamais été possible d'aligner à la fois plus de six Hurricane, trois Fulmar et un Gladiator contre la Luftwaffe - dont l'effectif variait, selon les raids, de quarante à quatre-vingts appareils.
La chasse et la D.C.A. réussirent pourtant à abattre seize avions allemands.
C - Stuka contre Wellington
Malte sous les bombes allemandes
Les dommages subis à la suite d'attaques aériennes par les navires affectés à l'opération Excess persuadèrent l'amiral Cunningham qu'il fallait suspendre toute traversée de la Méditerranée tant que le minimum de couverture aérienne qu'il réclamait depuis toujours ne serait pas en place.
Il était évident, à moins que son aviation ne fût considérablement renforcée, que Malte courait le danger d'être écrasée par les bombardiers de la Luftwaffe qui, compte tenu de leurs bombes plus lourdes et de la précision de leur tir, se montraient infiniment plus dangereux que les Italiens.
Les attaques, menées de jour et de nuit par le 10 C.A. aérien allemand - et qui continuèrent avec des intervalles de quelques jours dans le courant de février et de mars - visaient essentiellement l'arsenal, ses environs surpeuplés (La Valette, Senglea) et les trois aérodromes, où ils endommagèrent gravement les avions au sol. Ces raids combinaient d'habitude bombardements en piqué et attaques en rase-mottes effectués par des Ju-87 et des chasseurs bimoteurs Me-110, tandis que des bombardiers Ju-88 et He-111, couverts par des chasseurs d'escorte, larguaient des bombes d'une altitude de 2 000 mètres. Le poids de ces bombes allait de 50 à 500 kilos et atteignait parfois une tonne.
Le 20 janvier, le comité des chefs d'état-major décida que la présence de la Luftwaffe en Sicile rendait impossible la mise en œuvre du plan établi par l'amiral de la flotte du Sir Roger Keyes ; il s'agissait d'envoyer des commandos s'emparer de la petite île de Pantelleria - située au milieu du détroit de Sicile et à environ 190 kilomètres à l'ouest de Malte - que les Italiens utilisaient comme base aérienne et navale.
Churchill avait souligné que ce projet était «un réconfortant témoignage de l'esprit combatif». Il estimait qu'une fois aux mains des Britanniques, l'îlot pourrait servir à la fois de relais pour l'envoi de renforts aériens et de terrain de secours pour les chasseurs assurant la couverture du trafic maritime anglais dans les passes dangereuses et pour les bombardiers qui attaquaient le trafic ennemi.
Le port de La Valette sous les bombes ennemies
Les chefs d'état-major ne partageaient pas son enthousiasme, pas plus d'ailleurs que l'amiral Cunningham n'était disposé à voir se compliquer davantage les graves problèmes de ravitaillement dont la solution incombait à la flotte de la Méditerranée.
En conséquence, Malte resta le seul bastion anglais en Méditerranée centrale jusqu'à juin 1943, date à laquelle Pantelleria fut capturée, juste avant le débarquement en Sicile.
Le 21 janvier 1941, l'état-major britannique prescrivit au commandant en chef des forces aériennes de Méditerranée de fournir à Malte un nombre suffisant d'avions pour assurer sa défense et de faire en sorte que l'île, chaque fois que ce serait possible, fût utilisée comme base d'attaque.
D'après l'historien officiel, il s'agissait là d'une « politique dont - et c'est à porter à leur crédit - ni le gouverneur ni les responsables des forces de terre, de mer et de l'air ne se sont jamais départis ».
Les Wellington de la R.A.F continuaient de bombarder les aérodromes de Sicile, tandis que les Swordfish de l'aéronavale attaquaient le trafic maritime de l'Axe. Le 27 janvier, un hydravion Sunderland reconnut trois navires ennemis au large des côtes tunisiennes. Au cours de l'opération qui suivit, six Swordfish torpillèrent l'un des bâtiments, qui coula.
D - L'île invaincue
Les Anglais s'étant emparés de la Cyrénaïque et de El-Agheila le 8 février 1941, il en résulta une légère diminution des effectifs de la Luftwaffe en Sicile - une partie alla en effet renforcer les unités d'Afrique du Nord. Mais, à la fin du mois, les chasseurs revinrent presque chaque jour sur Malte, pour opérer des attaques en piqué massives sur les aérodromes.
Vue aérienne de Malte avec, à droite, le port de La Valette
Ce n'est qu'en février-avril 1941 que débute vraiment le calvaire des Maltais. Alors que l'Afrikakorps de Rommel arrive en Libye, le Xe Fliegerkorp allemand du général Geissler commence à effectuer des raids dévastateurs sur La Valette et les aérodromes de Luqa et de Hal Far. Les pilotes de la RAF se battirent avec courage, mais ils furent surclassés par des assaillants largement plus nombreux.
Mars débuta mal : cent appareils ennemis attaquèrent Hal-Far et endommagèrent gravement des avions au sol ainsi que les installations de l'aéroport. Ainsi, les deux tiers des Wellington sont détruits au sol et les quelques autres et Sunderland qui restaient durent gagner des bases moins menacées, en Egypte.
Pendant ce temps, la situation des insulaires empirait : les stocks ne cessaient de baisser. Le 23 mars, pourtant, arriva d'Alexandrie un petit convoi de ravitaillement (le premier depuis longtemps), accompagné.
Alors qu'il se trouvait encore en rade, 30 Ju-87 et 20 Me-109 l'attaquèrent et infligèrent de graves avaries à deux des navires ravitailleurs. Mais les 14 Hurricane de la défense aérienne abattirent 7 Stuka, tandis que la D.C.A. en descendait 4 autres.
Début avril, le porte-avions HMS Ark Royal, escorté par les puissantes unités de la Force H, déposent 12 nouveaux Hurricane en renfort. Trois semaines plus tard, l'opération est répétée avec une vingtaine de chasseurs, tandis que le cargo rapide S/S Breconshire gagne l'île assiégée sous la protection de la flotte d'Alexandrie. En Europe occuppée, Hitler et Mussolini envisagent de monter une opération aéroportée, baptisée « Hercule », pour s'emparer du rocher.
Mais le Führer, échaudé par l'ampleur des pertes subies par les Fallschirmjägers du général Student au cours de l'invasion de la Crête en mai (Opération « Merkur »), reporte l'opération sine die.
E - Malte sort la tête de l'eau
Un submersible de classe U à Malte
En attendant, Hitler et Mussolini décident que si l'anglais veut ravitailler Malte par la voie maritime, il devra en payer le prix fort ! Tout doit être fait pour obliger les convois anglais à naviguer au plus près des bases des bombardiers italo-allemands. La Regia Marina est à nouveau engagée dans une campagne de mouillage de mines.
Les 26 et 27 mai, une flottille de torpilleurs italiens composée des torpilleurs Circe, Calliope, Clio et du Perseo, pose un vaste champ de mines à l'Est de l'île. En septembre quatre torpilleurs escortés des destroyers Aviera et Camicia Nera mèneront une opération similaire. Les avions allemands et surtout italiens participent aussi au dispositif en larguant de nuit et à basse altitude des engins explosifs.
Deux sous-marins anglais en sont victimes. Le HMS Jersey percute une mine et coule devant l'entrée de Grand Harbour. Pour lutter efficacement contre les mines de l'Axe, les britanniques adjoignent aux chasseurs de mines de la Royal Navy, des Wellingtons du Coastal Command, modifiés pour emporter sous «leurs ventres» de grands cercles qui émettent des ondes magnétiques.
Les appareils volent ainsi à basse altitude et font sauter les mines immergées.
Un cargo décharge à Malte
A Londres, Churchill ordonne le renforcement de la défense de Malte par 48 nouveaux chasseurs Hawker Hurricanes. L'offensive allemande contre l'URSS en juin 1941 et l'affectation de nombreux appareils de la Luftwaffe donne un peu de répit aux Maltais. Pour combien de temps ? La chute de la Grèce et la conquête de l'île de Crète par les parachutistes allemands compliquent encore un peu plus le ravitaillement de l'île.
L'Amirauté britannique organise un système de transport d'urgence par sous-marins, tandis que 140 nouveaux appareils de la RAF viennent se poser sur les aérodromes maltais dont, 7 Maryland, 32 Blenheim, 15 Wellington, 12 Swordfish et 24 Albacore. Pendant ce temps la Royal Navy ne chaume pas. Les sous-marins des 8e et 10e flotilles multiplient les attaques contre les convois de l'Axe. L'Upholder expédie par le fond deux troopships italiens de 19 500 tonnes chacun (l'Oceania et le Neptunia).
Les avions-torpilleurs Swordfish et Albacore de la Fleet Air Arm s'en prennent aussi aux cargos chargés du ravitaillement destiné aux unités italo-allemandes engagées contre la 8th Army. Le ralentissement de l'activité aérienne adverse permet à l'Amirauté britannique de faire passer un nouveau convoi à destination de Malte en juillet. Il porte le nom de code évocateur de « Substance ».
F - La X MAS attaque
Le 26 juillet 1941, les italiens tentent une attaque de grand style contre le port de La Valette. Les nageurs de combat de la célèbre X Mas reçoivent l'ordre de pénétrer de nuit et par surprise au sein de la base anglaise et d'y couler un maximum de cargos appartenant au convoi «Substance».
Le cargo Diana, navire auxiliaire de la Regia Marina, quitte son port d'attache d'Augusta en Sicile avec à son bord 8 vedettes rapides. Deux torpilleurs l'escortent, tractant chacun une SLC « Maïale » (torpilles chargées de 300 kg de TNT et pilotées par des nageurs de combat).
Elles sont pilotées par le Major Tesei et le sous-officier Pedretti . Afin de désorganiser les défenses maltaises et de détourner l'attention des anglais, la Regia Aeronautica doit lancer un raid sur La Valette simultanément à l'approche des unités italiennes. Sur le papier ce plan semble imparable mais comme bien souvent les choses ne se déroulent pas comme prévues à l'origine.
Une série d'événements condamne dès le début l'attaque italienne à l'échec : le Diana est repéré par un radar à environ 20 miles des côtes de l'île et reste sous la constante surveillance des opérateurs britanniques.
Les appareils italiens sont quant à eux en avance et le raid s'achève beaucoup trop tôt obtenant comme seul et unique résultat le renforcement du système de surveillance britannique ! Les vedettes mises à la mer par le Diana foncent à toute allure vers le port espérant ainsi forcer le passage. Cependant, les premières explosions, au pied du fort de Saint Elmo, illuminent comme en plein jour les eaux de Grand Harbour.
Très vite les six navires rapides italiens restants sont pris sous le feu croisé de l'artillerie côtière anglaise (The Royal Malta artillery) qui les bombarde d'obus de tous calibres. L'effet de surprise n'est plus à l'ordre du jour et les vedettes sont coulées en quelques minutes. Les deux Maïales disparaissent en mer avec leurs pilotes. Côté anglais, on ne dénombre miraculeusement aucune perte, ni humaines, ni en matériels, hormis la destruction du viaduc de Grand Harbour !
En automne, les britanniques mobilisent de grosses unités de la Home Fleet pour escorter quelques convois de ravitaillement pour Malte, toujours sous les ombrelles de protection des chasseurs embarqués de la Fleet Air Arm. En octobre 1941, Londres décident la création d'un nouveau task Group, la Force K, basée en permanence à La Valette et composée des croiseurs HMS Aurora et HMS Penelope, ainsi que des destroyers HMS Lance et Lively. Sa mission est double : renforcer l'escorte des convois lors de l'approche de l'île et harceler, en coopération avec les sous-marins, les convois de ravitaillement et de renforts de l'Axe entre l'Italie et la Libye.
A - Les Allemands en Méditerranée
La Luftwaffe entre dans la partie
C'est alors que se produisit un de ces tournants imprévisibles et lourds de conséquences comme il en arrive en temps de guerre : de puissantes forces terrestres et aériennes allemandes apparurent soudainement dans le bassin méditerranéen. C'était la première manifestation du mécontentement de Hitler à propos de la façon dont les Italiens menaient leur guerre en Grèce et en Afrique du Nord. Le 8 janvier, les aérodromes de Sicile étaient couverts d'appareils allemands : 96 bombardiers et 25 chasseurs bimoteurs appartenant au 10 C.A. aérien, unité d'élite de la Luftwaffe, dont les effectifs totaux atteignaient 120 bombardiers, 150 Junkers 87 Stuka, 40 chasseurs et 20 appareils de reconnaissance.
Désormais, le 10 C.A. aérien allemand devait, en priorité, empêcher Malte de servir de base aux forces navales et aériennes britanniques, pour protéger les convois de l'Axe destinés à la Libye. Il devait également attaquer les lignes de communication maritimes anglaises avec l'Egypte et assurer la couverture des armées de l'Axe en Afrique du Nord.
Les Italiens possédant déjà en Sicile quelque 45 bombardiers et 75 chasseurs, outre un assez grand nombre d'appareils en Sardaigne, les navires de guerre et de commerce britanniques qui devraient passer en Méditerranée centrale allaient, à n'en pas douter, subir des attaques intensives. Mis à part les quelques avions embarqués qui pouvaient parfois se trouver disponibles dans ces eaux, les 15 Hurricane de la R.A.F. stationnés à Malte étaient les seuls chasseurs en mesure d'assurer une couverture aérienne, avec dix-huit appareils du même type qui arrivèrent sur l'île avec le premier convoi.
Malte entra dès lors dans la première phase d'une longue lutte pour la vie, une lutte qui allait mettre à rude épreuve le courage et l'endurance de ses défenseurs et des civils.
B - Feu sur l'Illustrious
Le convoi Excess
L'opération Excess - envoi d'un convoi particulièrement important - engagea toutes les forces maritimes disponibles d'un bout à l'autre de la Méditerranée et réussit à donner quelque répit à l'île. Le 8 janvier 1941, Malte reçut en renfort 500 soldats et aviateurs venus d'Alexandrie à bord des croiseurs Gloucester et Southampton.
Un des bâtiments de l'opération Excess venus de l'ouest, l'Essex, entra à Grand Harbour avec 4 000 tonnes de munitions, 3 000 tonnes de pommes de terre et 12 Hurricane, tandis qu'un autre débarquait 800 soldats.
Dans la nuit du 12 janvier, les Wellington basés à Malte attaquèrent l'aérodrome de Catane, mais ce n'était que l'un des nombreux terrains siciliens utilisés par le 10 C.A. aérien. Dans l'intervalle, un bâtiment qui constituait un important objectif pour la Luftwaffe était entré au port de La Valette.
Il s'agissait du porte-avions lllustrious, auquel des Stuka stationnés en Sicile avaient infligé de sérieuses avaries, et qui s'était traîné jusqu'à Malte, le 10 janvier, pour y être réparé. Le croiseur HMS Southampton est quant à lui mortellement touché et coule le 11 janvier, tandis que son sister-ship, le HMS Gloucester est endommagé par des bombes de 500 kg et 250 kg.
La Luftwaffe prit plusieurs jours de réflexion avant de décider qu'il fallait détruire l'Illustrious, ce qui valut quelque répit à Malte. Puis, le 15 janvier, des appareils de reconnaissance allemands survolèrent Grand Harbour.
L'Illustrious, le premier navire britannique achevé de sa classe
L'Illustrious : les Britanniques adoptent ce qui restera leur credo pour la construction de porte-avions pendant toute la guerre: le pont blindé.
Il devient dès son entrée ne service en 1940 le navire pivot de la Force A, responsable au premier chef de la survie de Malte. Elle va y contribuer puissamment en novembre 1940 en détruisant en une nuit la moitié de la flotte de cuirassés italiens basée à Tarente. Après le capitole, la roche tarpéenne : trois mois plus tard, le navire passe à deux doigts de la destruction en escortant le convoi Excess vers Malte. La bombe d'un des Stuka sera l'un des deux seuls projectiles à percer le pont blindé d'un porte-avions britannique pendant le conflit.
Profitant d'une période de mauvais temps, peu propice aux raids ennemis, les équipes de Malte travaillèrent sans relâche pour remettre en état de naviguer l'Illustrious et lui permettre de quitter Grand Harbour. Dans la nuit du 15 au 16 janvier 1941, la Luftwaffe lance son premier raid sur Malte et parachute des mines acoustiques dans le port de La Valette.
Tout est fait pour que le porte-avions anglais soit détruit. Le 16 une éclaircie permet à pas moins de 80 Junkers 88 et 87, escortés par des chasseurs italiens Fiat CR 42 de passer à l'attaque, attaquant par vagues successives, prenant pour objectif essentiel le porte-avions et l'arsenal.
Les Anglais ne peuvent opposer à ces escadrilles que 4 Hurricanes et 3 Fairey Fulmar. Miraculeusement une seule bombe atteint l'Illustrious ! Si l'lllustrious, malgré la hardiesse des attaques en rase-mottes, ne fut touché qu'une seule fois, l'arsenal, en revanche, subit des dégâts importants.
Des bombes détruisirent des bâtiments officiels, plusieurs églises anciennes et touchèrent le ravitailleur Essex, tuant ou blessant plusieurs dockers. Leurs camarades refusant alors de continuer à décharger le navire, marins et soldats terminèrent la besogne.
Relativement peuplées, les « trois villes » : Senglea, Vittoriosa et Cospicua, dont les habitants avaient perdu peu à peu toute prudence compte tenu de la relative inefficacité des premiers raids italiens, payaient à présent le prix de leur imprévoyance.
Il fallut sortir de nombreux habitants ensevelis sous les débris de leur maison. Près de cent personnes - hommes, femmes et enfants - trouvèrent la mort au cours de cette attaque allemande, la première d'une série dont les habitants se souviennent encore comme de « L'Illustrious Blitz ».
La D.C.A. du porte-avions et des défenses de l'arsenal n'avait pas cessé de tirer. Elle réussit à abattre cinq Stuka, tandis que les chasseurs - trois Fulmar et quatre Hurricane - en abattaient cinq autres.
Le 17 janvier, les Allemands se contentèrent simplement de procéder à des missions de reconnaissance. Le 18, ils attaquèrent surtout les aérodromes de Luka et de Hal-Far, détruisant six appareils au sol et endommageant un grand nombre d'autres.
C'est le lendemain que se déroula le raid le plus violent de la série.
Les Stuka s'en prirent de nouveau à l'Illustrious, qu'ils touchèrent une nouvelle fois. Les civils avaient fort heureusement compris la nécessité de se mettre à l'abri et les pertes en vies humaines furent légères.
Les réparations du porte-avions avaient été menées grand train pour lui permettre de quitter Malte le plus vite possible ; il réussit d'ailleurs à appareiller pour Alexandrie dans la nuit du 23.
Pendant les treize jours qu'il était resté à Malte, il n'avait jamais été possible d'aligner à la fois plus de six Hurricane, trois Fulmar et un Gladiator contre la Luftwaffe - dont l'effectif variait, selon les raids, de quarante à quatre-vingts appareils.
La chasse et la D.C.A. réussirent pourtant à abattre seize avions allemands.
C - Stuka contre Wellington
Malte sous les bombes allemandes
Les dommages subis à la suite d'attaques aériennes par les navires affectés à l'opération Excess persuadèrent l'amiral Cunningham qu'il fallait suspendre toute traversée de la Méditerranée tant que le minimum de couverture aérienne qu'il réclamait depuis toujours ne serait pas en place.
Il était évident, à moins que son aviation ne fût considérablement renforcée, que Malte courait le danger d'être écrasée par les bombardiers de la Luftwaffe qui, compte tenu de leurs bombes plus lourdes et de la précision de leur tir, se montraient infiniment plus dangereux que les Italiens.
Les attaques, menées de jour et de nuit par le 10 C.A. aérien allemand - et qui continuèrent avec des intervalles de quelques jours dans le courant de février et de mars - visaient essentiellement l'arsenal, ses environs surpeuplés (La Valette, Senglea) et les trois aérodromes, où ils endommagèrent gravement les avions au sol. Ces raids combinaient d'habitude bombardements en piqué et attaques en rase-mottes effectués par des Ju-87 et des chasseurs bimoteurs Me-110, tandis que des bombardiers Ju-88 et He-111, couverts par des chasseurs d'escorte, larguaient des bombes d'une altitude de 2 000 mètres. Le poids de ces bombes allait de 50 à 500 kilos et atteignait parfois une tonne.
Le 20 janvier, le comité des chefs d'état-major décida que la présence de la Luftwaffe en Sicile rendait impossible la mise en œuvre du plan établi par l'amiral de la flotte du Sir Roger Keyes ; il s'agissait d'envoyer des commandos s'emparer de la petite île de Pantelleria - située au milieu du détroit de Sicile et à environ 190 kilomètres à l'ouest de Malte - que les Italiens utilisaient comme base aérienne et navale.
Churchill avait souligné que ce projet était «un réconfortant témoignage de l'esprit combatif». Il estimait qu'une fois aux mains des Britanniques, l'îlot pourrait servir à la fois de relais pour l'envoi de renforts aériens et de terrain de secours pour les chasseurs assurant la couverture du trafic maritime anglais dans les passes dangereuses et pour les bombardiers qui attaquaient le trafic ennemi.
Le port de La Valette sous les bombes ennemies
Les chefs d'état-major ne partageaient pas son enthousiasme, pas plus d'ailleurs que l'amiral Cunningham n'était disposé à voir se compliquer davantage les graves problèmes de ravitaillement dont la solution incombait à la flotte de la Méditerranée.
En conséquence, Malte resta le seul bastion anglais en Méditerranée centrale jusqu'à juin 1943, date à laquelle Pantelleria fut capturée, juste avant le débarquement en Sicile.
Le 21 janvier 1941, l'état-major britannique prescrivit au commandant en chef des forces aériennes de Méditerranée de fournir à Malte un nombre suffisant d'avions pour assurer sa défense et de faire en sorte que l'île, chaque fois que ce serait possible, fût utilisée comme base d'attaque.
D'après l'historien officiel, il s'agissait là d'une « politique dont - et c'est à porter à leur crédit - ni le gouverneur ni les responsables des forces de terre, de mer et de l'air ne se sont jamais départis ».
Les Wellington de la R.A.F continuaient de bombarder les aérodromes de Sicile, tandis que les Swordfish de l'aéronavale attaquaient le trafic maritime de l'Axe. Le 27 janvier, un hydravion Sunderland reconnut trois navires ennemis au large des côtes tunisiennes. Au cours de l'opération qui suivit, six Swordfish torpillèrent l'un des bâtiments, qui coula.
D - L'île invaincue
Les Anglais s'étant emparés de la Cyrénaïque et de El-Agheila le 8 février 1941, il en résulta une légère diminution des effectifs de la Luftwaffe en Sicile - une partie alla en effet renforcer les unités d'Afrique du Nord. Mais, à la fin du mois, les chasseurs revinrent presque chaque jour sur Malte, pour opérer des attaques en piqué massives sur les aérodromes.
Vue aérienne de Malte avec, à droite, le port de La Valette
Ce n'est qu'en février-avril 1941 que débute vraiment le calvaire des Maltais. Alors que l'Afrikakorps de Rommel arrive en Libye, le Xe Fliegerkorp allemand du général Geissler commence à effectuer des raids dévastateurs sur La Valette et les aérodromes de Luqa et de Hal Far. Les pilotes de la RAF se battirent avec courage, mais ils furent surclassés par des assaillants largement plus nombreux.
Mars débuta mal : cent appareils ennemis attaquèrent Hal-Far et endommagèrent gravement des avions au sol ainsi que les installations de l'aéroport. Ainsi, les deux tiers des Wellington sont détruits au sol et les quelques autres et Sunderland qui restaient durent gagner des bases moins menacées, en Egypte.
Pendant ce temps, la situation des insulaires empirait : les stocks ne cessaient de baisser. Le 23 mars, pourtant, arriva d'Alexandrie un petit convoi de ravitaillement (le premier depuis longtemps), accompagné.
Alors qu'il se trouvait encore en rade, 30 Ju-87 et 20 Me-109 l'attaquèrent et infligèrent de graves avaries à deux des navires ravitailleurs. Mais les 14 Hurricane de la défense aérienne abattirent 7 Stuka, tandis que la D.C.A. en descendait 4 autres.
Début avril, le porte-avions HMS Ark Royal, escorté par les puissantes unités de la Force H, déposent 12 nouveaux Hurricane en renfort. Trois semaines plus tard, l'opération est répétée avec une vingtaine de chasseurs, tandis que le cargo rapide S/S Breconshire gagne l'île assiégée sous la protection de la flotte d'Alexandrie. En Europe occuppée, Hitler et Mussolini envisagent de monter une opération aéroportée, baptisée « Hercule », pour s'emparer du rocher.
Mais le Führer, échaudé par l'ampleur des pertes subies par les Fallschirmjägers du général Student au cours de l'invasion de la Crête en mai (Opération « Merkur »), reporte l'opération sine die.
E - Malte sort la tête de l'eau
Un submersible de classe U à Malte
En attendant, Hitler et Mussolini décident que si l'anglais veut ravitailler Malte par la voie maritime, il devra en payer le prix fort ! Tout doit être fait pour obliger les convois anglais à naviguer au plus près des bases des bombardiers italo-allemands. La Regia Marina est à nouveau engagée dans une campagne de mouillage de mines.
Les 26 et 27 mai, une flottille de torpilleurs italiens composée des torpilleurs Circe, Calliope, Clio et du Perseo, pose un vaste champ de mines à l'Est de l'île. En septembre quatre torpilleurs escortés des destroyers Aviera et Camicia Nera mèneront une opération similaire. Les avions allemands et surtout italiens participent aussi au dispositif en larguant de nuit et à basse altitude des engins explosifs.
Deux sous-marins anglais en sont victimes. Le HMS Jersey percute une mine et coule devant l'entrée de Grand Harbour. Pour lutter efficacement contre les mines de l'Axe, les britanniques adjoignent aux chasseurs de mines de la Royal Navy, des Wellingtons du Coastal Command, modifiés pour emporter sous «leurs ventres» de grands cercles qui émettent des ondes magnétiques.
Les appareils volent ainsi à basse altitude et font sauter les mines immergées.
Un cargo décharge à Malte
A Londres, Churchill ordonne le renforcement de la défense de Malte par 48 nouveaux chasseurs Hawker Hurricanes. L'offensive allemande contre l'URSS en juin 1941 et l'affectation de nombreux appareils de la Luftwaffe donne un peu de répit aux Maltais. Pour combien de temps ? La chute de la Grèce et la conquête de l'île de Crète par les parachutistes allemands compliquent encore un peu plus le ravitaillement de l'île.
L'Amirauté britannique organise un système de transport d'urgence par sous-marins, tandis que 140 nouveaux appareils de la RAF viennent se poser sur les aérodromes maltais dont, 7 Maryland, 32 Blenheim, 15 Wellington, 12 Swordfish et 24 Albacore. Pendant ce temps la Royal Navy ne chaume pas. Les sous-marins des 8e et 10e flotilles multiplient les attaques contre les convois de l'Axe. L'Upholder expédie par le fond deux troopships italiens de 19 500 tonnes chacun (l'Oceania et le Neptunia).
Les avions-torpilleurs Swordfish et Albacore de la Fleet Air Arm s'en prennent aussi aux cargos chargés du ravitaillement destiné aux unités italo-allemandes engagées contre la 8th Army. Le ralentissement de l'activité aérienne adverse permet à l'Amirauté britannique de faire passer un nouveau convoi à destination de Malte en juillet. Il porte le nom de code évocateur de « Substance ».
F - La X MAS attaque
Le 26 juillet 1941, les italiens tentent une attaque de grand style contre le port de La Valette. Les nageurs de combat de la célèbre X Mas reçoivent l'ordre de pénétrer de nuit et par surprise au sein de la base anglaise et d'y couler un maximum de cargos appartenant au convoi «Substance».
Le cargo Diana, navire auxiliaire de la Regia Marina, quitte son port d'attache d'Augusta en Sicile avec à son bord 8 vedettes rapides. Deux torpilleurs l'escortent, tractant chacun une SLC « Maïale » (torpilles chargées de 300 kg de TNT et pilotées par des nageurs de combat).
Elles sont pilotées par le Major Tesei et le sous-officier Pedretti . Afin de désorganiser les défenses maltaises et de détourner l'attention des anglais, la Regia Aeronautica doit lancer un raid sur La Valette simultanément à l'approche des unités italiennes. Sur le papier ce plan semble imparable mais comme bien souvent les choses ne se déroulent pas comme prévues à l'origine.
Une série d'événements condamne dès le début l'attaque italienne à l'échec : le Diana est repéré par un radar à environ 20 miles des côtes de l'île et reste sous la constante surveillance des opérateurs britanniques.
Les appareils italiens sont quant à eux en avance et le raid s'achève beaucoup trop tôt obtenant comme seul et unique résultat le renforcement du système de surveillance britannique ! Les vedettes mises à la mer par le Diana foncent à toute allure vers le port espérant ainsi forcer le passage. Cependant, les premières explosions, au pied du fort de Saint Elmo, illuminent comme en plein jour les eaux de Grand Harbour.
Très vite les six navires rapides italiens restants sont pris sous le feu croisé de l'artillerie côtière anglaise (The Royal Malta artillery) qui les bombarde d'obus de tous calibres. L'effet de surprise n'est plus à l'ordre du jour et les vedettes sont coulées en quelques minutes. Les deux Maïales disparaissent en mer avec leurs pilotes. Côté anglais, on ne dénombre miraculeusement aucune perte, ni humaines, ni en matériels, hormis la destruction du viaduc de Grand Harbour !
En automne, les britanniques mobilisent de grosses unités de la Home Fleet pour escorter quelques convois de ravitaillement pour Malte, toujours sous les ombrelles de protection des chasseurs embarqués de la Fleet Air Arm. En octobre 1941, Londres décident la création d'un nouveau task Group, la Force K, basée en permanence à La Valette et composée des croiseurs HMS Aurora et HMS Penelope, ainsi que des destroyers HMS Lance et Lively. Sa mission est double : renforcer l'escorte des convois lors de l'approche de l'île et harceler, en coopération avec les sous-marins, les convois de ravitaillement et de renforts de l'Axe entre l'Italie et la Libye.
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Re: Dossier de Campagne
Chapitre 3 – 1942 : Anno Horribilis pour Malte ?
A – Le retour de la Luftwaffe : bis repetita
Le Maréchal Kesselring, revenu de Russie en décembre 1941 avec sa IIe Luftflotte, tente de faire changer le Führer d'avis sur « Hercule » et fait valoir que 75 % des convois axistes à destination de l'Afrique ont été coulés à la fin de 1941. Les Italiens et les Allemands temporisent : « Hercule » sera montée, mais il faut au préalable ensevelir Malte sous les bombes. Kesselring s'exécute. De janvier à avril 41, l'île endure 2.000 raids dont 14 dans la seule journée du 14 janvier !
Les deux aérodromes alliés, les quais de Grand Habour et les quartiers d'habitation de la Valette sont durement touchés. Cependant la rusticité des constructions permet aux habitations de rester dans des états relativement corrects. Le destroyer HMS Maori, nouveau venu à la Force K, est coulé à quai.
Les navires de Mussolini sont bien tôt renforcés par les vedettes de la 3e MTB allemande. Les marins allemands réussissent l'exploit de miner, de nuit, le port de la Valette au nez et à la barbe des britanniques ! La famine règne à Malte. Mais le moral de la garnison, et plus important encore, celui de la population, tient bon. George VI, roi d'Angleterre, lui décerne la Saint George Cross, Roosevelt la Presidential Citation.
Ce à quoi les Maltais répliquent que les médailles, « ça ne se mange pas » ! Londres réagit en expédiant à Malte des Spitfires Mk V depuis les ponts d'envol des HMS Argus et Eagle. Les bons vieux Hurricanes ne tiennent plus la distance face aux Messerchmitt Bf-109F. En attendant les convois de l'Axe passent à nouveau et renforcent l'Afrikakorps. Aucun cargo italien ne coule en janvier...
Comme nous allons le voir, il n'en va pas de même pour les navires alliés. En effet, les convois anglais sont eux aussi devenus des cibles pour les appareils de la Luftwaffe. Ils sont détruits en mer par les bombardiers de Kesselring ; le 12 février trois cargos sont envoyés par le fond, bombardés par des Stukas et des bimoteurs JU 88A-4. Les U-Boote sont aussi de la partie et infligent de lourdes pertes à la Royal Navy ainsi qu'au Silent Service.
Le 20 mars 1942, un convoi rapide anglais quitte Alexandrie et met le cap vers Malte. Quatre cargos escortés de plusieurs navires de guerre, dont des croiseurs légers, transportent un chargement désormais devenu vital pour Malte. Après avoir échappé à une attaque de la Regia Marina, le convoi arrive enfin le 23 en vue de La Vallette. Mais une fois de plus les pilotes allemands passent à l'attaque. Le cargo S/S Breconshire est touché à trois reprises, tandis que le S/S Clan Campbell est coulé à quelques encablures de l'entrée du port.
Le lendemain 200 avions attaquent La Valette et le port, seuls cinq Hurricanes sont en l'air et peuvent s'opposer au raid. Le résultat est sans appel... Les trois cargos et leur chargement sont coulés à quai.
A la mi-1942, la situation est critique. Non seulement l'île n'est plus approvisionnée mais pour ne rien arranger, Malte est littéralement encerclée par des champs de mines. Les appareils de l'Axe s'acharnent sur le port de la Valette. Le HMS Southwold heurte une mine et coule en quelques minutes. Les sous-marins anglais P-39 et P-36 partagent le sort du submersible grec Glafkos envoyé par le fond par les bombardiers italo-allemands. Le navire de ravitaillement Pandora est détruit, ainsi que le destroyer HMS Gallant déjà endommagé en 1941.
A Malte, c'est le sauve qui peut général ! Les navires de sa Majesté reçoivent l'ordre de quitter le port et de rejoindre Gibraltar. La Force K n'existe plus. Le destroyer HMS Havock, s'échoue sur des hauts-fonds au large du Cap Bon (Tunisie). Il est achevé un peu plus tard par les torpilles d'un sous-marin italien. Le croiseur HMS Penelope, affectueusement surnommé « Pepperhot » par les Maltais, aura plus de chance. Il se faufile de nuit et parvient à rejoindre Gibraltar. Les destroyers HMS Lance et Kingston sombrent tous les deux dans les eaux de Grand Harbour.
Les choses vont mal ! L'état du stock de munitions accentue le côté catastrophique de la situation. La DCA n'a presque plus d'obus. On va même jusqu'à rationner l'eau douce. Seuls les sous-marins et le destroyer rapide HMS Welshman, surnommé « Milkman » par les habitants de la Valette, permettent encore d'apporter le strict minimum à Malte.
Le HMS WELSHMAN à Malte
Les Etats-unis, désormais en guerre contre l'Allemagne et l'Italie, participent à un convoi de secours. Aucun porte-avions britannique n'étant disponible c'est l'USS Wasp, escorté par le HMS cuirassé Renown, les croiseurs antiaériens HMS Cairo et Charybdis ainsi que 6 destroyers (dont deux de l'US Navy), qui dépose sur l'île 47 Spitfires flambants neufs.
Les chasseurs appartiennent aux 601 et 603 Squadrons et sont destinés à la défense aérienne de Malte. 15 minutes après leur arrivée les appareils sont surpris au sol par un raid de bombardiers. La moitié des chasseurs est détruite !
Il ne reste que 26 appareils. 59 nouveaux appareils seront livrés par le HMS Eagle et le Wasp en juin 1942. Ils seront renforcés par des avions torpilleurs Beaufighter et des bombardiers Wellington ainsi que 30 nouveaux Spitfires.
Les Britanniques lancent les opérations « Harpoon » (convoi au départ de Gibraltar) et « Vigourous » (convoi au départ d'Alexandrie) : 17 cargos, dont un pétrolier américain, le Kentucky, doivent rallier Malte pour ravitailler la population et les défenseurs de l'île. A peine deux, les cargos Troilus et Orari, y parviennent ! Les Stukas, les sous-marins italiens et les E-Boote de la 3 MTB sont passés par là...
Le USS WASP (CV-7) en 1940 à Cuba
Les Spitfire décolle du WASP pour Malte
A cette date, Rommel, impressionné par ses succès à Gazala et Tobrouk, a convaincu Hitler et Mussolini qu'une invasion de Malte n'est plus nécessaire, que l'Egypte est à portée de main et que la Luftwaffe doit l'appuyer avec tous les moyens disponibles. « Hercule » est enterré.
A Malte justement, le gouverneur britannique, Sir Edward Jackson n'a presque plus de réserves alimentaires et de munitions. La place forte peut tenir jusqu'en septembre mais pas au-delà...
B – « Pedestal » : le convoi de la dernière chance
En août, les Britanniques montent une autre opération de ravitaillement, celle de la dernière chance. Nom de code : « Pedestal ». 13 cargos et 1 pétrolier (chargé de Kérosène pour les chasseurs de Malte) protégés par 4 porte-avions (HMS Victorious, Eagle, Furious et Indomitable) et leurs 72 chasseurs embarqués, 2 cuirassés (HMS Nelson et Rodney), 7 croiseurs, 34 torpilleurs, 8 sous-marins, devront ravitailler Malte.
Les alliés pensent à tout et désignent le convoi par l'acronyme WS, afin de tromper les services de renseignement de l'Axe (WS désignait les convois au départ de Suez vers le Cap de Bonne Espérance). La RAF est elle aussi de la partie. Elle offre au convoi une couverture ASM (Hydravions Sunderland) et la collaboration de ses appareils de reconnaissance à longue portée.
Le puissant cuirassé HMS RODNEY
Le HMS EAGLE, victime de l’U-73
Les Allemands et les Italiens mobilisent leur flotte sous-marine et leur aviation. La Regia Aeronautica met en alerte 320 appareils, tandis que les Junkers 88 des II et X Fliegerkorps se préparent à l'assaut depuis leurs bases sardes.
Le 11 août le porte-avions HMS Eagle est coulé par 4 torpilles lancées depuis l'U-73 du Kapitänleutnant Helmut Rosenbaum. Rosenbaum est décoré de la Croix de chevalier pour cette attaque. Le bâtiment sombre en 6 minutes, entraînant 37 Sea Hurricanes avec lui.
Le porte-avions HMS Indomitable est lui-aussi endommagé par des Stukas escortés de Me 109 et Me 110, 2 croiseurs (HMS Cairo et Manchester) sont envoyés par le fond. Les raids des Junkers 87 et 88, des Heinkel He 111H-6 bombardiers/torpilleurs et des SM79 italiens sont incessants. Le convoi est désorganisé et au fur et à mesure de son approche vers Malte, il entre dans le champ d'actions des forces ennemies. Ainsi « Pedestal » est-il en train de doubler le Cap Bon que déjà les E-Boote allemands et les Mas lancent-ils leurs attaques à la torpille.
Cette défaite compromet les chances de victoire britanniques. La Royal Navy, qui a déjà perdu le porte-avions HMS Ark Royal fin 1941, ne peut se permettre de nouvelles pertes en porte-avions. L'escorte se retire vers Gibraltar. Quatre cargos sur quatorze atteignent Malte, ainsi que le pétrolier américain Ohio, gravement touché par une torpille, des bombes et un Junkers crashé sur ses superstructures. Au total on décharge environ 30.000 tonnes d'approvisionnement, du carburant, des munitions et une trentaine de Spitfires dans leurs caisses.
Malgré les pertes subies, « Pedestal » est un succès. Malte est sauvée ! Elle a reçu du matériel, des vivres, des munitions, du carburant, et 126 Spitfires qui iront renforcer la garnison. Les convois de l'Axe, épargnés au cours du premier semestre 1942, sont à nouveau interceptés, privant Rommel de renforts qui auraient pu lui assurer la victoire à El Alamein.
Avec 11 escadrilles anglaises, Malte a permis aux Alliés de couler 550 000 tonnes de matériel ennemi ! Le Renard du Désert, en s'opposant à « Hercule », a commis là l'erreur de sa carrière…
A la demande de Rommel, Kesselring tente une dernière série de raids en octobre, mais Malte est désormais équipée de radars modernes. Les chasseurs de la Royal Air Force et de la Fleet Air Arm décollent à temps et interceptent systématiquement les bombardiers allemands au dessus de la mer. Le 19 octobre, puis le 20, les appareils de la Luftwaffe font une ultime tentative pour atteindre et bombarder La Valette. Le 21 octobre, le ciel reste vide...
La Grande-Bretagne venait de gagner la bataille aérienne de Malte ! Le 23 octobre le Général Montgomery lance la bataille d'El-Alamein, c'est le début de la fin pour l'Afrika Korps et l'Axe en Afrique du Nord.
C – La fin du calvaire de Malte
Un cargo entre dans le port de Saint Paul’s Bay. A noter le camouflage très complexe…
En novembre les destroyers rapides HMS Welshman et Manxman ravitaillent l'île. Les alliés débarquent en Afrique du Nord Française, c'est l'opération « Torch ».
Le 20 un convoi de quatre cargos fait son entrée à Grand Harbour. Malte est définitivement tirée d'affaire. Depuis janvier 1941, 2 Porte-avions, 4 croiseurs, 16 destroyers, 5 sous-marins et de nombreuses autres petites unités auront été perdu par la Royal Navy uniquement pour assurer le ravitaillement de Malte.
L'île aura reçu rien qu'en mars et avril 1942, le double de bombes que Londres pendant tout le Blitz ! Les aérodromes d'Hal far et Taquali furent quant à eux 27 fois plus bombardés que la ville de Coventry. 15 500 immeubles furent rasés produisant 4 535 000 tonnes de gravats uniquement pour La Valette... Malte avait payé un lourd tribut.
Conclusion
Finalement, l’île fut sauvée par l’indécision des états-majors de l’Axe. Hitler répugnait à lancer une opération aéroportée, car il craignait de voir ses parachutistes essuyer des pertes encore plus importantes qu’en Crète. Quant à Mussolini, il hésitait à lancer sa marine dans une opération contre la Royal Navy. Ils optèrent donc pour un blocus dans l’espoir d’obtenir à terme la reddition des Maltais.
Alors que son ravitaillement devenait difficile, Malte elle-même était la cible des bombardiers de l’Axe. En dépit des attaques incessantes, les Maltais continuaient à travailler dans les docks pour réparer les bateaux de la Royal Navy, tandis que quelques 15 000 hommes se portaient volontaires pour combattre en première ligne. En 1941, la garnison de l’île développa aussi une tactique de défense anti-aérienne qui, par la suite, fut largement copiée.
Au lieu de suivre un avion pour essayer de l’atteindre, les canonniers ajustaient leurs tirs à l’avance de façon à saturer d’obus un périmètre donné. Il suffisait ensuite d’attendre que l’appareil ennemi entre dans le périmètre pour l’abattre. La méthode se révéla particulièrement efficace. Songeant avant tout à échapper à la DCA, les pilotes italiens et allemands étaient incapables de larguer leurs bombes avec précisions. La situation devenait malgré tout de plus en plus critique.
Finalement, pendant les dix premiers mois des hostilités, de juin 1940 à fin mars 1941, période au cours de laquelle Malte se trouva aux premières lignes de la guerre en Méditerranée, l'île se défendit seule et avec la plus grande résolution contre des forces bien supérieures, tout en exploitant au mieux ses propres ressources offensives.
Il ne fait guère de doute, pourtant, qu'au début, alors que la garnison et les défenses terrestres et aériennes demeuraient encore très insuffisantes, un adversaire plus résolu et plus entreprenant aurait pu s'emparer de Malte, ce qui aurait eu des conséquences extrêmement graves sur la suite de la guerre. Mais les Italiens laissèrent passer l'occasion et si l'île dut affronter à plusieurs reprises au cours des deux années suivantes des dangers plus grands encore, elle tint bon malgré tout et joua un rôle essentiel dans l'édification de la victoire.
L’arrivée des Spitfire sur le théâtre maltais en février 1941 allait considérablement changer la donne d’un point de vue tactique. Et les errements stratégiques sur le front de l’Est, ayant notamment pour conséquence le prélèvement d’unités de la Luftwaffe de fronts dit « secondaires » pour alimenter la guerre à l’Est, devaient contribuer à la défaite de l’Axe dans ce secteur.
La défaite des forces de l’Axe à Malte scelle définitivement le destin de l’Afrika Korps de Rommel.
A – Le retour de la Luftwaffe : bis repetita
Le Maréchal Kesselring, revenu de Russie en décembre 1941 avec sa IIe Luftflotte, tente de faire changer le Führer d'avis sur « Hercule » et fait valoir que 75 % des convois axistes à destination de l'Afrique ont été coulés à la fin de 1941. Les Italiens et les Allemands temporisent : « Hercule » sera montée, mais il faut au préalable ensevelir Malte sous les bombes. Kesselring s'exécute. De janvier à avril 41, l'île endure 2.000 raids dont 14 dans la seule journée du 14 janvier !
Les deux aérodromes alliés, les quais de Grand Habour et les quartiers d'habitation de la Valette sont durement touchés. Cependant la rusticité des constructions permet aux habitations de rester dans des états relativement corrects. Le destroyer HMS Maori, nouveau venu à la Force K, est coulé à quai.
Les navires de Mussolini sont bien tôt renforcés par les vedettes de la 3e MTB allemande. Les marins allemands réussissent l'exploit de miner, de nuit, le port de la Valette au nez et à la barbe des britanniques ! La famine règne à Malte. Mais le moral de la garnison, et plus important encore, celui de la population, tient bon. George VI, roi d'Angleterre, lui décerne la Saint George Cross, Roosevelt la Presidential Citation.
Ce à quoi les Maltais répliquent que les médailles, « ça ne se mange pas » ! Londres réagit en expédiant à Malte des Spitfires Mk V depuis les ponts d'envol des HMS Argus et Eagle. Les bons vieux Hurricanes ne tiennent plus la distance face aux Messerchmitt Bf-109F. En attendant les convois de l'Axe passent à nouveau et renforcent l'Afrikakorps. Aucun cargo italien ne coule en janvier...
Comme nous allons le voir, il n'en va pas de même pour les navires alliés. En effet, les convois anglais sont eux aussi devenus des cibles pour les appareils de la Luftwaffe. Ils sont détruits en mer par les bombardiers de Kesselring ; le 12 février trois cargos sont envoyés par le fond, bombardés par des Stukas et des bimoteurs JU 88A-4. Les U-Boote sont aussi de la partie et infligent de lourdes pertes à la Royal Navy ainsi qu'au Silent Service.
Le 20 mars 1942, un convoi rapide anglais quitte Alexandrie et met le cap vers Malte. Quatre cargos escortés de plusieurs navires de guerre, dont des croiseurs légers, transportent un chargement désormais devenu vital pour Malte. Après avoir échappé à une attaque de la Regia Marina, le convoi arrive enfin le 23 en vue de La Vallette. Mais une fois de plus les pilotes allemands passent à l'attaque. Le cargo S/S Breconshire est touché à trois reprises, tandis que le S/S Clan Campbell est coulé à quelques encablures de l'entrée du port.
Le lendemain 200 avions attaquent La Valette et le port, seuls cinq Hurricanes sont en l'air et peuvent s'opposer au raid. Le résultat est sans appel... Les trois cargos et leur chargement sont coulés à quai.
A la mi-1942, la situation est critique. Non seulement l'île n'est plus approvisionnée mais pour ne rien arranger, Malte est littéralement encerclée par des champs de mines. Les appareils de l'Axe s'acharnent sur le port de la Valette. Le HMS Southwold heurte une mine et coule en quelques minutes. Les sous-marins anglais P-39 et P-36 partagent le sort du submersible grec Glafkos envoyé par le fond par les bombardiers italo-allemands. Le navire de ravitaillement Pandora est détruit, ainsi que le destroyer HMS Gallant déjà endommagé en 1941.
A Malte, c'est le sauve qui peut général ! Les navires de sa Majesté reçoivent l'ordre de quitter le port et de rejoindre Gibraltar. La Force K n'existe plus. Le destroyer HMS Havock, s'échoue sur des hauts-fonds au large du Cap Bon (Tunisie). Il est achevé un peu plus tard par les torpilles d'un sous-marin italien. Le croiseur HMS Penelope, affectueusement surnommé « Pepperhot » par les Maltais, aura plus de chance. Il se faufile de nuit et parvient à rejoindre Gibraltar. Les destroyers HMS Lance et Kingston sombrent tous les deux dans les eaux de Grand Harbour.
Les choses vont mal ! L'état du stock de munitions accentue le côté catastrophique de la situation. La DCA n'a presque plus d'obus. On va même jusqu'à rationner l'eau douce. Seuls les sous-marins et le destroyer rapide HMS Welshman, surnommé « Milkman » par les habitants de la Valette, permettent encore d'apporter le strict minimum à Malte.
Le HMS WELSHMAN à Malte
Les Etats-unis, désormais en guerre contre l'Allemagne et l'Italie, participent à un convoi de secours. Aucun porte-avions britannique n'étant disponible c'est l'USS Wasp, escorté par le HMS cuirassé Renown, les croiseurs antiaériens HMS Cairo et Charybdis ainsi que 6 destroyers (dont deux de l'US Navy), qui dépose sur l'île 47 Spitfires flambants neufs.
Les chasseurs appartiennent aux 601 et 603 Squadrons et sont destinés à la défense aérienne de Malte. 15 minutes après leur arrivée les appareils sont surpris au sol par un raid de bombardiers. La moitié des chasseurs est détruite !
Il ne reste que 26 appareils. 59 nouveaux appareils seront livrés par le HMS Eagle et le Wasp en juin 1942. Ils seront renforcés par des avions torpilleurs Beaufighter et des bombardiers Wellington ainsi que 30 nouveaux Spitfires.
Les Britanniques lancent les opérations « Harpoon » (convoi au départ de Gibraltar) et « Vigourous » (convoi au départ d'Alexandrie) : 17 cargos, dont un pétrolier américain, le Kentucky, doivent rallier Malte pour ravitailler la population et les défenseurs de l'île. A peine deux, les cargos Troilus et Orari, y parviennent ! Les Stukas, les sous-marins italiens et les E-Boote de la 3 MTB sont passés par là...
Le USS WASP (CV-7) en 1940 à Cuba
Les Spitfire décolle du WASP pour Malte
A cette date, Rommel, impressionné par ses succès à Gazala et Tobrouk, a convaincu Hitler et Mussolini qu'une invasion de Malte n'est plus nécessaire, que l'Egypte est à portée de main et que la Luftwaffe doit l'appuyer avec tous les moyens disponibles. « Hercule » est enterré.
A Malte justement, le gouverneur britannique, Sir Edward Jackson n'a presque plus de réserves alimentaires et de munitions. La place forte peut tenir jusqu'en septembre mais pas au-delà...
B – « Pedestal » : le convoi de la dernière chance
En août, les Britanniques montent une autre opération de ravitaillement, celle de la dernière chance. Nom de code : « Pedestal ». 13 cargos et 1 pétrolier (chargé de Kérosène pour les chasseurs de Malte) protégés par 4 porte-avions (HMS Victorious, Eagle, Furious et Indomitable) et leurs 72 chasseurs embarqués, 2 cuirassés (HMS Nelson et Rodney), 7 croiseurs, 34 torpilleurs, 8 sous-marins, devront ravitailler Malte.
Les alliés pensent à tout et désignent le convoi par l'acronyme WS, afin de tromper les services de renseignement de l'Axe (WS désignait les convois au départ de Suez vers le Cap de Bonne Espérance). La RAF est elle aussi de la partie. Elle offre au convoi une couverture ASM (Hydravions Sunderland) et la collaboration de ses appareils de reconnaissance à longue portée.
Le puissant cuirassé HMS RODNEY
Le HMS EAGLE, victime de l’U-73
Les Allemands et les Italiens mobilisent leur flotte sous-marine et leur aviation. La Regia Aeronautica met en alerte 320 appareils, tandis que les Junkers 88 des II et X Fliegerkorps se préparent à l'assaut depuis leurs bases sardes.
Le 11 août le porte-avions HMS Eagle est coulé par 4 torpilles lancées depuis l'U-73 du Kapitänleutnant Helmut Rosenbaum. Rosenbaum est décoré de la Croix de chevalier pour cette attaque. Le bâtiment sombre en 6 minutes, entraînant 37 Sea Hurricanes avec lui.
Le porte-avions HMS Indomitable est lui-aussi endommagé par des Stukas escortés de Me 109 et Me 110, 2 croiseurs (HMS Cairo et Manchester) sont envoyés par le fond. Les raids des Junkers 87 et 88, des Heinkel He 111H-6 bombardiers/torpilleurs et des SM79 italiens sont incessants. Le convoi est désorganisé et au fur et à mesure de son approche vers Malte, il entre dans le champ d'actions des forces ennemies. Ainsi « Pedestal » est-il en train de doubler le Cap Bon que déjà les E-Boote allemands et les Mas lancent-ils leurs attaques à la torpille.
Cette défaite compromet les chances de victoire britanniques. La Royal Navy, qui a déjà perdu le porte-avions HMS Ark Royal fin 1941, ne peut se permettre de nouvelles pertes en porte-avions. L'escorte se retire vers Gibraltar. Quatre cargos sur quatorze atteignent Malte, ainsi que le pétrolier américain Ohio, gravement touché par une torpille, des bombes et un Junkers crashé sur ses superstructures. Au total on décharge environ 30.000 tonnes d'approvisionnement, du carburant, des munitions et une trentaine de Spitfires dans leurs caisses.
Malgré les pertes subies, « Pedestal » est un succès. Malte est sauvée ! Elle a reçu du matériel, des vivres, des munitions, du carburant, et 126 Spitfires qui iront renforcer la garnison. Les convois de l'Axe, épargnés au cours du premier semestre 1942, sont à nouveau interceptés, privant Rommel de renforts qui auraient pu lui assurer la victoire à El Alamein.
Avec 11 escadrilles anglaises, Malte a permis aux Alliés de couler 550 000 tonnes de matériel ennemi ! Le Renard du Désert, en s'opposant à « Hercule », a commis là l'erreur de sa carrière…
A la demande de Rommel, Kesselring tente une dernière série de raids en octobre, mais Malte est désormais équipée de radars modernes. Les chasseurs de la Royal Air Force et de la Fleet Air Arm décollent à temps et interceptent systématiquement les bombardiers allemands au dessus de la mer. Le 19 octobre, puis le 20, les appareils de la Luftwaffe font une ultime tentative pour atteindre et bombarder La Valette. Le 21 octobre, le ciel reste vide...
La Grande-Bretagne venait de gagner la bataille aérienne de Malte ! Le 23 octobre le Général Montgomery lance la bataille d'El-Alamein, c'est le début de la fin pour l'Afrika Korps et l'Axe en Afrique du Nord.
C – La fin du calvaire de Malte
Un cargo entre dans le port de Saint Paul’s Bay. A noter le camouflage très complexe…
En novembre les destroyers rapides HMS Welshman et Manxman ravitaillent l'île. Les alliés débarquent en Afrique du Nord Française, c'est l'opération « Torch ».
Le 20 un convoi de quatre cargos fait son entrée à Grand Harbour. Malte est définitivement tirée d'affaire. Depuis janvier 1941, 2 Porte-avions, 4 croiseurs, 16 destroyers, 5 sous-marins et de nombreuses autres petites unités auront été perdu par la Royal Navy uniquement pour assurer le ravitaillement de Malte.
L'île aura reçu rien qu'en mars et avril 1942, le double de bombes que Londres pendant tout le Blitz ! Les aérodromes d'Hal far et Taquali furent quant à eux 27 fois plus bombardés que la ville de Coventry. 15 500 immeubles furent rasés produisant 4 535 000 tonnes de gravats uniquement pour La Valette... Malte avait payé un lourd tribut.
Conclusion
Finalement, l’île fut sauvée par l’indécision des états-majors de l’Axe. Hitler répugnait à lancer une opération aéroportée, car il craignait de voir ses parachutistes essuyer des pertes encore plus importantes qu’en Crète. Quant à Mussolini, il hésitait à lancer sa marine dans une opération contre la Royal Navy. Ils optèrent donc pour un blocus dans l’espoir d’obtenir à terme la reddition des Maltais.
Alors que son ravitaillement devenait difficile, Malte elle-même était la cible des bombardiers de l’Axe. En dépit des attaques incessantes, les Maltais continuaient à travailler dans les docks pour réparer les bateaux de la Royal Navy, tandis que quelques 15 000 hommes se portaient volontaires pour combattre en première ligne. En 1941, la garnison de l’île développa aussi une tactique de défense anti-aérienne qui, par la suite, fut largement copiée.
Au lieu de suivre un avion pour essayer de l’atteindre, les canonniers ajustaient leurs tirs à l’avance de façon à saturer d’obus un périmètre donné. Il suffisait ensuite d’attendre que l’appareil ennemi entre dans le périmètre pour l’abattre. La méthode se révéla particulièrement efficace. Songeant avant tout à échapper à la DCA, les pilotes italiens et allemands étaient incapables de larguer leurs bombes avec précisions. La situation devenait malgré tout de plus en plus critique.
Finalement, pendant les dix premiers mois des hostilités, de juin 1940 à fin mars 1941, période au cours de laquelle Malte se trouva aux premières lignes de la guerre en Méditerranée, l'île se défendit seule et avec la plus grande résolution contre des forces bien supérieures, tout en exploitant au mieux ses propres ressources offensives.
Il ne fait guère de doute, pourtant, qu'au début, alors que la garnison et les défenses terrestres et aériennes demeuraient encore très insuffisantes, un adversaire plus résolu et plus entreprenant aurait pu s'emparer de Malte, ce qui aurait eu des conséquences extrêmement graves sur la suite de la guerre. Mais les Italiens laissèrent passer l'occasion et si l'île dut affronter à plusieurs reprises au cours des deux années suivantes des dangers plus grands encore, elle tint bon malgré tout et joua un rôle essentiel dans l'édification de la victoire.
L’arrivée des Spitfire sur le théâtre maltais en février 1941 allait considérablement changer la donne d’un point de vue tactique. Et les errements stratégiques sur le front de l’Est, ayant notamment pour conséquence le prélèvement d’unités de la Luftwaffe de fronts dit « secondaires » pour alimenter la guerre à l’Est, devaient contribuer à la défaite de l’Axe dans ce secteur.
La défaite des forces de l’Axe à Malte scelle définitivement le destin de l’Afrika Korps de Rommel.
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Re: Dossier de Campagne
Annexe A - Batailles en Méditerranée
Quand il déclare la guerre à la Grande-Bretagne en juin 1940, Mussolini espère établir la suprématie de l’Italie dans le Bassin méditerranéen. Mais la Navy va contrecarrer ses projets.
Grâce aux efforts de réarmement déployés dans les années 1930, l’Italie dispose en 1940 de la marine la plus puissante de Méditerranée.
Elle peut aligner des bâtiments modernes et bien armés, même si leur blindage avait parfois été réduit au profit de la vitesse. Mais l’Amirauté britannique dispose d’un avantage décisif.
Certes plus lents et plus anciens, ses navires sont mieux blindés et bénéficient du soutien de porte-avions qui font défaut aux Italiens. Très vite, l’essentiel des affrontements se concentre sur les convois qui ravitaillent les armées du front d’Afrique du Nord.
En juillet, deux batailles navales se soldent pour les Italiens par la perte du croiseur Bartolomeo Colleoni.
A - Attaque surprise
Le 11 novembre 1940, 20 avions anglais armés de torpilles attaquent la base navale italienne de Tarente. La surprise est totale. Un cuirassé est coulé et deux autres mis hors d’état de combattre pour plusieurs mois.
Pendant l’hiver eurent lieu de nombreux engagements de moindre importance, occasionnant des pertes des deux côtés. Au printemps suivant, chaque camp se préparait à la bataille décisive.
En mars 1941, la Luftwaffe annonçe, à tort, avoir endommagé deux des trois cuirassés anglais. Espérant détruire à peu de frais les convois anglais à destination de la Grèce, l’amiral Angelo Iachino se dirigea vers la mer Egée à la tête d’une force composée du cuirassé Vittorio Veneto, de 8 croiseurs et d’une flotille de contre-torpilleurs.
Informés des mouvements italiens grâce au décryptage du code radio ennemi, l’amiral Cunningham prit la mer depuis Alexandrie avec ses trois cuirassés intacts, le porte-avions Formidable et une escorte de destroyers.
Au premier plan, le HMS Renown, croiseur de la Royal Navy. En 1940, ce bâtiment servait en Méditerranée.
Engagé en août 1940, le cuirassé Vittorio Veneto était l'un des plus puissants bâtiments de la marine italienne.
Le 28 mars, le choc a lieu, les deux flottes établissent le contact. Les avions torpilleurs du Formidable endommagent le Vittorio Veneto et immobilisent le croiseur Pola. La bataille se poursuivit pendant la nuit, l’amiral Cunningham s’étant lancé à la poursuite de la flotte italienne qui tentait de regagner ses bases.
Mal renseigné sur la position des Anglais, Iachino envoya 2 croiseurs et 4 contre-torpilleurs pour remorquer le Pola. C’est au large du cap Matapan que ce groupe de secours fut intercepté et presque entièrement coulé par les cuirassés de la Navy. Seuls deux contre-torpilleurs en réchappèrent.
Après avoir recueilli un maximum de rescapés, l’amiral Cunningham envoya un message radio aux Italiens pour leur permettre de localiser les marins qui dérivaient encore à bord de leurs canots de sauvetage.
B - Nouvelle stratégie
Après le désastre du cap Matapan, les Italiens renoncèrent à toute confrontation avec la Navy, sauf lorsqu’ils étaient certains d’avoir une plus grande puissance de feu. Ils lancèrent par ailleurs la construction de deux porte-avions pour donner à leur flotte l’appui aérien dont elle manquait tant. Cela dit, à la fin de la guerre, ces deux bâtiments n’étaient toujours pas achevés. Jusqu’au débarquement en Afrique du Nord, on assista par conséquent à une série de petits engagements. Le 12 décembre 1941, des destroyers britanniques parviennent à surprendre et à couler deux croiseurs italiens.
Cinq jours plus tard, dans le golfe de Syrte, c’est la Navy qui déplore la perte d’un croiseur et d’un destroyer, alors que deux de ses croiseurs sont endommagés. Le 23 mars 1942, un nouvel affrontement se produit dans le golfe de Syrte, avec des pertes sévères des deux côtés.
Dans l’intervalle, il était devenu évident que, pour venir à bout de la Navy, il fallait impérativement s’emparer de Malte, d’où décollent les avions de reconnaissance anglais. Dès lors, l’île devint le premier objectif des forces de l’Axe en Méditerranée.
Annexe B - Le raid sur Tarente
En novembre 1940, l'armée italienne est en train de subir de lourds échecs en Grèce mais sa flotte dans la Méditerranée demeure imposante. De plus, la flotte anglaise ne peut plus compter sur l'appui de la flotte française de Toulon. Il était donc capital de rééquilibrer les forces en Méditerranée.
Durant la nuit du 11 novembre 1940, les Anglais lancent une opération aéronavale dont les Italiens se souviendront et dont les Japonais s'inspireront un an plus tard. Cette attaque a lieu à Tarente où sont stationnés les plus gros navires de la flotte italienne.
La base navale de Tarente, comme toutes les bases navales italiennes, était bien équipée pour la réparation des unités endommagées grâce, surtout, à la présence de grands bassins de carénage et d'un arsenal disposant de toutes les pièces de rechange pour la machinerie et pour les armes. Par contre, la protection anti-aérienne et anti-torpilles des navires basés dans le port avait de graves carences.
Les batteries anti-aériennes étaient insuffisantes tant du point de vue du nombre que du calibre. À cela, il faut ajouter la faible protection nocturne due à l'absence de radar. Par conséquent, le repérage des avions ennemis en approche reposait sur de vieux projecteurs à faible portée, guidés par des aérophones datant de la Première Guerre mondiale.
En ce qui concerne la protection contre les torpilles, elle reposait sur des filets anti-torpilles, également peu nombreux à cause du manque de matière première dont souffrait l'industrie italienne.
La production de filets atteignait 3 600 mètres par mois à répartir entre toutes les bases italiennes et des 12 800 mètres prévus pour la protection des navires positionnés dans le golfe de Tarente, à peine un peu plus de la moitié était arrivée à destination et la plus grande partie n'était pas encore mise en place.
Cuirassé italien. Engagé en août 1940, le cuirassé Vittorio Veneto était l'un des plus puissants bâtiments de la marine italienne.
En août 1940, deux nouvelles unités de guerre de la Regia Marina entrèrent en service : les imposants navires de guerre Vittorio Veneto et Littorio.
D'une longueur de 238 mètres, ils développaient une vitesse maximale de 30 nœuds et avaient un déplacement de 41 300 t standard. La cuirasse seule pesait 13 600 t. L'armement se composait de 9 canons de 381/50 mm répartis en trois tourelles triples, de 12 canons de 152/55 mm et de 12 canons de 90/50 mm. Ils étaient également dotés de 4 de 120/40 mm pouvant tirer des obus éclairant et 20 mitrailleuses anti-aériennes de 37/54 mm et 30 de 20/65 mm.
Deux mois plus tard, les troupes italiennes envahirent l'Epire, dans le cadre de la guerre italo-grecque, obligeant la Grande-Bretagne à s'impliquer militairement aux côtés de la Grèce, autant pour éviter que les Italiens ne finissent par contrôler la mer Egée, mettant ainsi en péril Alexandrie, que pour décourager la Turquie d'entrer dans le conflit au sein de l'Axe.
Cela entraîna une forte augmentation du nombre de convois maritimes britanniques partant de l'Égypte afin d'apporter une fourniture sans cesse plus importante de matériel de guerre aux ports grecs et à l'île de Malte, place-forte britannique stratégique située entre la Sicile et la Tunisie, près de laquelle passaient les convois maritimes italiens en route vers la Libye.
Ces manœuvres se déroulant à proximité de Tarente, l'amirauté britannique se méfiait des navires italiens qui y étaient basés et qui pourraient facilement rejoindre et couler ses convois maritimes.
La Royal Navy, en la personne du Commandant en Chef de la Mediterranean Fleet, l'amiral Andrew Cunningham, décida alors de préparer une opération destinée à couler ou endommager les unités navales italiennes basées à Tarente. Elle perfectionna un plan d'attaque nocturne avec des avions torpilleurs Fairey Swordfish déjà mis au point en 1935 par l'amiral Lumley Lyster lors de la deuxième guerre Italo-Abyssine. Le plan était très risqué et reposait essentiellement sur le facteur surprise.
Les porte-avions d'où devaient décoller les avions accomplissant la mission devaient se rapprocher à moins de 130 milles marins de la côte italienne, au risque d'être découverts par l'ennemi. En outre la rade devait être illuminée en recourant à des avions illuminateurs, pendant que les avions-torpilleurs volaient au ras de l'eau, pour éviter les batteries anti-aériennes et pour éviter que les torpilles ne s'enfoncent dans la vase de la rade.
En fait, si les navires italiens avaient étendu les couvertures de fumigènes, la mission aurait certainement été un échec.
Le Conte di Cavour, coulé par les Swordfish britanniques durant le raid
L'opération « Judgement » débuta le 6 novembre 1940 : les navires de ligne Malaya, Ramillies, Valiant et Warspite, le porte-avions Illustrious, les croiseurs Gloucester et York ainsi que 13 destroyers, partirent d'Alexandrie vers Malte, dans les alentours de laquelle se trouvait le porte-avions Eagle.
Le 8 novembre, alarmé par ces manoeuvres dans la Méditerranée, le Commandement suprême de la Marine italienne envoya une unité de destroyers, torpilleurs et submersibles en patrouille dans le canal de Sicile et fit rassembler dans la base de Tarente la plus grosse partie de la force navale italienne.
Les navires britanniques atteignirent Malte dans la journée du 10 novembre et le jour suivant le porte-avions Illustrious commença à se diriger vers le point de rendez-vous pour lancer ses avions vers Tarente. Le porte-avions Eagle ne put par contre pas appareiller à cause d'une avarie moteur.
Ce contre-temps diminua le nombre d'avions disponibles mais n'empêcha pas l'opération d'avoir lieu.
Les avions britanniques effectuèrent des reconnaissances de Tarente à partir de Malte jusque dans la soirée du 11 novembre, lorsque la Royal Navy apprit que les navires de ligne Andrea Doria, Caio Duilio, Conte di Cavour, Giulio Cesare, Littorio et Vittorio Veneto, les croiseurs lourds Bolzano, Fiume, Gorizia, Pola, Trento, Trieste et Zara, les deux croiseurs légers Luigi Savoia Duca degli Abruzzi et Giuseppe Garibaldi et plusieurs destroyers s'étaient regroupés dans les deux rades de Tarente. Pour citer l'amiral Andrew Cunningham : « Tous les oiseaux étaient dans le nid ».
87 ballons étaient prévus pour défendre le port, mais les mauvaises conditions climatiques des journées précédentes en avaient arraché 60 et ils n'avaient pas encore pu être remplacés à cause du manque d'hydrogène.
Les unités navales étaient protégées par des filets anti-torpilles, mais seulement 4 200 des 8 600 mètres nécessaires pour une défense efficace étaient disposés. Ces filets n'étaient en outre tendus qu'à 10 mètres de profondeur laissant ainsi un espace non protégé entre les filets et le fond marin.
L'amiral Inigo Campioni avait en outre demandé à ce que les filets de protection soient placés à une distance permettant aux navires d'appareiller rapidement sans devoir retirer les protections auparavant.
Le Littorio, gravement endommagé
À 20h30 les avions de la première vague d'attaque décollent du porte-avions Illustrious. Ils arrivent sur l'objectif quelques minutes avant 23h00 et sont accueillis par un puissant tir de barrage. Deux feux de bengale sont lancés pour illuminer le profil des cibles, pendant que 6 avions-torpilleurs Fairey Swordfish descendent à bonne hauteur pour torpiller.
Un premier avion, qui allait être abattu, lâche une torpille sur le Conte di Cavour, qui lui déchire le flanc gauche, deux autres visent le Andrea Doria, sans parvenir à le toucher. En même temps, 4 autres avions-torpilleurs endommagent les destroyers Libeccio et Pessagno et bombardent les dépôts de carburant. À 23h15, deux avions-torpilleurs attaquent en même temps le Littorio, le touchant à bâbord et à tribord, pendant que le dernier Swordfish lance sans succès une torpille contre le Vittorio Veneto.
À 23h20, les avions de la première vague se retirent, mais à 23h30, arrivent ceux de la seconde vague. Malgré le tir de barrage, un premier Swordfish lance une torpille sur le Caio Duilio, le touchant à tribord, pendant que deux avions-torpilleurs touchent le Littorio. Un autre avion vise le Vittorio Veneto qui est une nouvelle fois épargné, pendant qu'un second Swordfish est abattu alors qu'il tentait d'attaquer le Gorizia. Enfin, une dernière attaque endommage gravement le croiseur Trento. Les derniers avions se replient à 00h30 le 12 novembre. L'attaque de Tarente avait fait 59 victimes. En 90 minutes, les avions-torpilleurs de la Royal Navy avaient causé des dommages considérables, la moitié de la force navale italienne était hors service.
C'est un énorme succès pour les Britanniques. Au début de l'année, la Méditerranée était dominée par les six cuirassés, nombreux croiseurs, destroyers et sous-marins italiens. Après 3 mois de combats, la flotte italienne avait perdu deux croiseurs, trois cuirassés et neuf destroyers, perdant ainsi son titre de première puissance navale en Méditerranée.
Le raid de Tarente ne coûta aux Britanniques que deux appareils de la Fleet Air Arm, l'équipage de l'un d'eux s'étant fait capturé. Le ministre de la Marine (V. Alexander) profita de ce succès pour souligner que la Fleet Air Arm avait détruit au moins 55 avions ennemis en Norvège, dans les îles britanniques et en Méditerranée. La RAF s'est alors vu octroyer soixante-huit pilotes provenant de la Marine.
Cette attaque prouva une fois pour toute la menace que représentent les forces aéronavales pour les navires qui mouillent dans des ports. Les Américains ne retinrent pas de leçon de cela et en paieront le prix à Pearl Harbor.
Cette attitude face à la puissance des forces aéronavales remonte à loin. La plupart des grandes puissances ne créèrent pas d'armée de l'air indépendante avant les années 30, malgré les formidables progrès effectués en aéronautique depuis la Première Guerre mondiale, où la force aérienne avait pu s'illustrer ... mais elle fut oubliée.
Annexe C – La guerre du désert : juin 1940 / mars 1943
A – Introduction
Il n’est pas inutile de rappeler sommairement les principales phases de ce que l’on a pu appeler « la guerre du désert », cette dernière étant étroitement liée aux événements qui se sont déroulés à Malte. Plus la situation à Malte se détériorera pour les britanniques, plus le ravitaillement parviendra à l’Afrika Korps dans de bonnes conditions. En parallèle, lorsque les britanniques se ressaisiront à Malte, c’est la DAK qui ira de défaites en défaites, le ravitaillement ne se faisant plus qu’au compte-goutte…
Malte était perçue comme « l’infection à guérir », selon Hitler. De fait, l’île était une véritable épine dans le pied des forces de l’Axe, de par sa situation stratégique, et sa capacité à fortement gêner le ravitaillement de l’Axe en Afrique.
Et l’échec de l’Axe à la neutraliser précipitera sa défaite en Afrique du Nord…
La guerre du désert est donc un épisode de la Seconde Guerre mondiale généralement traité à part compte tenu de sa chronique et de sa durée. Elle oppose l'armée coloniale libyenne de l'Empire italien à la huitième armée britannique gardant l'Égypte ; les forces de l'Axe sont bientôt reconfigurées sous l'égide du Deutsches Afrika Korps. La guerre du désert proprement dite est prolongée par la campagne de Tunisie, et s'achève par la prise de contrôle de l'Afrique du Nord par les Alliés.
Le désert de cette partie de la campagne d'Afrique du Nord se révéla un théâtre périphérique d'importance pour les forces de l'Axe comme les Alliés vis-à-vis des fronts du théâtre européen. Les ressources stratégiques dans l'objectif des forces de l'Axe étaient considérables, mais les moyens furent mobilisés dans la « croisade contre le bolchevisme », ainsi que la propagande hitlérienne nomma l'agression contre l'URSS.
Elle connaît trois étapes : commencée par les Italiens sur un principe colonial visant à restaurer la primauté d'un empire néo-romain sur le bassin méditerranéen par la jonction de la Libye avec l'Abyssinie, colonie italienne matée dans le sang, elle se poursuit par une intervention du corps expéditionnaire allemand visant à ouvrir l'accès aux champs pétrolifères du Moyen-Orient une fois sauté le verrou britannique du Caire. Rommel n'y parvint jamais faute de moyens. La troisième étape est le reflux des italo-allemands hors de Libye jusqu'au début de 1943, sur les plages de Tunisie où prit fin l'aventure dite chevaleresque de ces combats où la chance et le hasard eurent leur mot à dire. La guerre du désert s'était achevée avec les débarquements américains en Afrique du Nord.
La défaite de Rommel, perceptible après la seconde bataille d'El Alamein est considérée comme un des tournants de la guerre.
L'aspect chevaleresque est aussi largement dû à la légende instaurée autour des exploits du général Rommel, qui amena au limogeage de ses adversaires successifs britanniques placés à la tête de la 8e armée en Égypte. Chacun reconnut avoir eu affaire à un ennemi exceptionnel par son acuité sur le terrain. Tout ceci se déroulait alors que le front de l'Est devenait une tuerie d'une horreur époustouflante.
Le flux et le reflux des armées le long des côtes tripolitaines et cyrénaïques selon le rapport des forces et les vicissitudes de l'approvisionnement par la Méditerranée donnent le particularisme de cet épisode du conflit.
B - Les 3 phases de la guerre du désert
1 - La guerre des Italiens, de septembre 1940 à janvier 1941
En septembre 1940, les troupes italiennes du maréchal Rodolfo Graziani, en Libye, attaquèrent l'Égypte, mais se heurtèrent à une contre-offensive anglaise. Hitler dut soutenir les troupes italiennes en Afrique du Nord et envoya dans ce but l'Afrikakorps sous les ordres du général Rommel.
2 - Le renard du désert, de février 1941 (nomination de Rommel) à juillet 1942 (le DAK à la frontière égyptienne)
Erwin Rommel est officiellement mandaté le 6 février 1941. Il arrive à Tripoli et part directement en reconnaissance par avion au-dessus du désert. Il ne suit pas ses instructions qui sont d'attendre le débarquement des renforts constituant le corps expéditionnaire allemand, et reprend l'offensive dès que possible au grand dam de la hiérarchie italienne.
Le 31 mars 1941, Rommel avait repoussé les troupes britanniques de la Libye jusqu'aux frontières de l'Égypte. Le 26 mai, Rommel lança la sixième campagne de Libye, prit Tobrouk le 20 juin.
La première bataille d'El Alamein, en Égypte a opposé les forces de l'Axe dirigées par le général Rommel à la huitième armée britannique commandée par Claude Auchinleck.
Suite à leur défaite lors de la bataille de Gazala, les alliés s'étaient repliés sur une ligne défensive, entre El Alamein, au bord de la mer, et la dépression de Qattara dans le désert. Ils souhaitaient ainsi protéger Alexandrie, Le Caire et le canal de Suez. L'offensive de l'Afrika Korps, lancée le 1er juillet, ne permit pas à Rommel de percer les lignes britanniques. Il s'ensuivit une série de contre-attaques, de part et d'autre, pendant tout le mois de juillet, qui ne procurèrent pas d'avantage décisif aux belligérants. Cependant, l'avance des Allemands et des Italiens ayant été stoppée, on peut considérer qu'il s'agit d'une victoire pour les Alliés.
Rommel subit, à Bir-Hakeim, un revers majeur infligé par les forces de la France Libre commandées par le général Koenig. Bir-Hakeim scelle ainsi l'issue de la guerre du désert préparant le terrain à la seconde bataille d'El Alamein remportée par Bernard Montgomery qui refoula définitivement les forces de l'Axe du territoire libyen fin 1942.
3 - La fin du Deutsches Afrika Korps, d’août 1942 (nomination de Monty) au 12 mai 1943 (reddition du Korps)
En octobre-novembre 1942, le sort de cette guerre se joue à nouveau à El Alamein : l'armée britannique, pendant l'été et le début de l'automne, parvient à reconstituer ses forces, ce qui lui permettra de mener une offensive décisive lors de la seconde bataille d'El Alamein. Cette victoire alliée marque un tournant important dans la campagne d'Afrique du Nord, lors de la Seconde Guerre mondiale.
Certains historiens estiment que la bataille d'El Alamein est l'une des victoires majeures qui ont contribué à la victoire alliée en Afrique du Nord. En novembre 1942, Winston Churchill résuma cette bataille dans les termes suivants : « Ce n'est pas la fin, ni même le commencement de la fin. Mais c'est peut-être la fin du commencement ».
Le débarquement allié en Afrique du Nord en novembre 1942 place Rommel dans une situation intenable. Sa santé s'est de plus gravement altérée. Il est rappelé en Allemagne au pire moment pour ses troupes.
C – Les principales batailles de la période du DAK
Batailles
1941 :
Opération Battleaxe
Le siège de Tobrouk
Opération Crusader
1942 :
Bataille de Bir-Hakeim
Première bataille d'El Alamein
Seconde bataille d'El Alamein
1 – Opération « Battle Axe » - Du 15 au 17 juin 1940 – Lieu : Cyrénaïque, Lybie
L’opération Battleaxe, également connue sous le nom de bataille de Sollum, est une opération conduite par l'armée britannique en juin 1941.
Elle visait à chasser les armées allemande et italienne de l'est de la Cyrénaïque, afin notamment de lever le siège de Tobrouk. C'est la première fois de la guerre où des forces allemandes significatives se retrouvaient sur la défensive.
L'opération fut néanmoins un échec, car l'assaut initial des forces britanniques se heurta à de solides positions défensives organisées par le général Erwin Rommel. Les Britanniques perdirent plus de la moitié de leurs tanks dès le premier jour et ne réussirent que sur l'une de leurs trois zones de poussée. Le deuxième jour, ils obtinrent des résultats mitigés en étant repoussés sur leur flanc ouest, mais en arrêtant une importante contre-attaque allemande sur leur centre. Le troisième jour, les Britanniques évitèrent de justesse un désastre complet en se retirant avec succès juste avant d'être encerclés par les Allemands.
L'échec de cette opération conduit au remplacement du général Archibald Wavell, commandant en chef des opérations au Moyen-Orient.
2 – Le siège de Tobrouk - Du 10 avril au 27 novembre 1941 - Lieu : Tobrouk (Libye)
Le siège de Tobrouk a été un affrontement entre les forces de l'Axe et celles des Alliés en Libye au cours de la guerre du désert. Le siège a commencé le 10 avril 1941 lorsque Tobrouk a été attaqué par les forces italo-allemandes du lieutenant général Erwin Rommel et a continué pendant 240 jours, quand il a été stoppé par la 8e armée britannique lors de l'opération Crusader.
Les Britanniques voulaient empêcher les Italiens et les Allemands de s'emparer de Tobrouk, qui disposait d'un port et d'une station d'épuration d'eau, qui leur étaient nécessaires pour la poursuite de la guerre en Libye. Le général Archibald Wavell, commandant en chef des armées de terre britanniques au Moyen-Orient (il fut remplacé par le général Claude Auchinleck), était opposé au général Erwin Rommel, qui était sous les ordres du maréchal Italo Gariboldi, qui était le commandant suprême des forces de l'Axe en Afrique du Nord.
Les Alliés avaient engagé la 2e division blindée et la 9e division d'infanterie australienne, soit 23 000 hommes. Les forces de l'Axe avaient engagé la 5e division légère allemande, la division blindée italienne Ariete, et deux divisions d'infanterie italiennes, soit au total 100 000 hommes.
Tobrouk était le seul bon port en eau profonde de l'Afrique du Nord, entre l'Égypte et la Tunisie. Ce port était un enjeu stratégique, qui opposa en 1941 et 1942 les Britanniques et les Italo-Allemands. Le 21 janvier 1941, le général O'Connor s'était emparé de Sidi Barrani. Le 12 février, alors qu'il pouvait chasser définitivement les Italiens de Libye, Churchill lui ordonna d'arrêter l'offensive. O'Connor fut relevé de son commandement, et les 7e DB et 6e DI furent remplacées par le Cyrenaica Command, qui était composé de deux divisions inexpérimentées : la 2e division blindée Britannique et la 9e division d'infanterie australienne.
Le même jour, le général Erwin Rommel arrivait à Tripoli. Il avait été envoyé par Hitler à la tête de l'Afrikakorps (5e division légère et 15e division Panzer), pour secourir les Italiens. Il devait tenir Tripoli. Mais il ignora les ordres du maréchal Gariboldi, et passa à l'offensive contre le Cyrénaica Command, le 24 mars 1941. Il attaqua avec deux divisions d'infanterie Italiennes, la division blindée Ariete, la 5e DL (qui allait devenir la 21e division Panzer), et un régiment de chars de la 15e division Panzer. Rommel reprit El Agheila et Adjedabia. Les blindés du général Von Prittwitz prirent la direction de Tobrouk. Cette ville, qui était un port-forteresse, risquait de lui interdire la poursuite de son offensive en direction de l'Égypte.
Tobrouk permettait aux Britanniques de recevoir des renforts en hommes et en matériel. Le général Wavell, aidé par l'amiral Cunningham, fit renforcer le périmètre défensif autour de la ville, qui était profond de 50 kilomètres, avec des lignes d'ouvrages bétonnés, des fossés antichars, et des champs de mines. Il confia ce périmètre au général Leslie Morshead, qui disposait de quatre brigades d'infanterie Australiennes, d'une partie de la 3e division blindée et de quatre régiments d'artillerie. À Bardia, près de la frontière, le général Gott mit en place un corps d'armée qui devait venir soutenir les défenseurs de Tobrouk.
Benghazi tomba aux mains des forces de l'Axe le 5 avril, suivit de Derna le 7, et de Bardia, le 9. Le 15 avril, Rommel, après avoir parcouru 800 kilomètres en trois semaines, atteignit la passe d'Halfaya. Le 11 et le 15 avril, la 9e division d'infanterie australienne, qui était repliée derrière les lignes fortifiées de Tobrouk, repoussa les attaques allemandes.
La ville fut assaillie, et Prittwitz ayant été tué au combat, Rommel prit la direction des opérations. Il lança alors des assauts blindés, qui étaient appuyés par des bombardiers en piqué, mais ils furent repoussés. Le 30, les Allemands lancèrent une attaque de grande envergure. Ils réussirent à progresser, mais ils durent se replier cinq jours plus tard, le 4 mai. Tobrouk fut bombardée pendant des semaines par l'artillerie et l'aviation ennemies.
Wavell lança alors deux opérations qui devaient secourir les assiégés. La première, qui avait pour nom de code "Brevity", se déroula vers la mi-mai mais échoua. La seconde, qui s'appelait "Battleaxe", se déroula du 15 au 16 juin, et n'eut pas plus de résultats que la première. Le 21 juin, le général Wavell fut remplacé par le général Claude Auchinleck. Les deux camps avaient renforcés leurs effectifs : Rommel disposait désormais de la 90e division légère, de la 21e Panzer (ancienne 5e DL), de la 15e Panzer, de la division blindée Ariete, et de la 6e d'infanterie italienne, soit 150 000 hommes et 588 chars. Les Britanniques, qui avaient été victorieux en Éthiopie, concentraient tous leurs efforts sur la Libye, qui était devenue le seul théâtre d'opérations d'Afrique. 200 chars britanniques Mathilda et Crusader arrivèrent au Caire.
En septembre, Auchinleck fit remplacer les Australiens par la brigade polonaise des Carpates du général Kopański, et la 70e division d'infanterie britannique du général Scobie, qui avait été nommé à la place de Morshead. Il créa la VIIIe armée, qui fut confiée au général Cunningham, et qui rassemblait le 13e corps d'infanterie, et le 30e corps blindé (118 000 hommes et 724 chars). Elle avait pour mission de délivrer la ville.
C'est le 18 novembre, que l'opération Crusader fut déclenchée. Le 13e corps d'infanterie essaya de tourner la passe d'Halfaya, qui était tenue par les Italo-Allemands. Le 30e corps blindé attaqua Rommel par surprise à Sidi Rezegh, au sud-est de Tobrouk. Du 20 au 22 novembre, les Britanniques perdirent 200 chars lors de la bataille de Sidi Rezegh. Auchinleck se rendit sur place le 23, et remplaça Cunningham (qui voulait battre en retraite) par le général Ritchie, et décida de tenir les hauteurs de Sidi Rezegh.
Rommel, après avoir vu qu'il ne pouvait pas tenir cette situation, ordonna la retraite, en abandonnant la 55e division d'infanterie italienne à Halfaya. Le 26 novembre, après que la 1re division d'infanterie néo-zélandaise eut délogé la 90e division légère allemande de Sidi Rezegh, la garnison de Tobrouk fit une sortie pour s'emparer d'El Duda, et les hommes de Scobie et de Ritchie firent leur jonction.
Le siège de la ville était terminé, il avait duré 240 jours, coûté 27 bâtiments à la Royal Navy, et sauvé l'Égypte d'une invasion par les forces de l'Axe. Le 30 décembre 1941, Rommel se retrouva au point de départ de sa campagne, à El Agheila. Juste pour la bataille finale, les Alliés avaient eu 18 000 tués et blessés, tandis que les forces de l'Axe comptaient 38 000 tués et blessés.
3 – Opération « Crusader » - Du 19 novembre au 17 décembre 1941 - Lieu : frontière Lybio-Egyptienne
Après l'échec de l'opération Battle Axe, les Britanniques ont besoin d'une victoire pour remonter le moral de leurs troupes et de leur population. L'arrivée d'Auchinleck à la tête du front à la place de Wavell change les habitudes britanniques dans le désert. L'opération a lieu après un été sans combat, lors duquel les deux adversaires se sont renforcés.
C'est à partir de la mi-novembre 1941 que débute l'opération Crusader, qui par sa confusion est une bataille caractéristique de la Seconde Guerre mondiale.
Les débuts britanniques sont difficiles et les allemands infligent de très lourdes pertes à leurs forces blindées, notamment à Sidi Rezeigh : tout laisse à penser que l'opération Crusader risque d'être encore plus catastrophique que l'opération Battle Axe.
Mais les Britanniques et leurs alliées du Commonwealth réagissent et infligent aux troupes allemandes de lourdes pertes et, peu de temps après, ceux-ci sont obligés de battre en retraite à Gazala et d'abandonner le siège de Tobrouk.
Enfin, le 15 décembre, Erwin Rommel doit se replier sous la pression britannique et abandonner toute la Cyrénaïque aux Britanniques.
4 – Bataille de « Bir Hakeim » - Du 26 mai au 11 juin 1942 - Lieu : Bir Hakeim (Libye)
Bir Hakeim est un point d'eau désaffecté au milieu du désert de Libye, auprès duquel avait jadis existé un fortin turc. Pendant seize jours, du 26 mai au 11 juin 1942, la première brigade française libre du général Kœnig y résista aux attaques des armées motorisées italiennes et allemandes (l'Afrika Korps) du général Rommel.
Le répit, ainsi gagné par les Français libres, permit aux Britanniques, en mauvaise posture, de se replier et de triompher par la suite à El Alamein. Le général Saint-Hillier dira en octobre 1991 dans un entretien : « Il fallut qu'un grain de sable enrayât l'avance italo-allemande, qui n'atteignit El-Alamein qu'après l'arrivée des divisions britanniques fraîches : le grain de sable s'appelait Bir Hakeim ».
5 – Les deux batailles « d’El Alamein » - Du 1er juillet au 27 juillet 1942 et du 23 octobre au 3 novembre 1942 - Lieu : El Alamein en Égypte
Rommel voulait atteindre Le Caire, et la VIIIème armée Britannique avait pour mission d'arrêter l'avance des Italo-Allemands(dans la première bataille) et de les repousser d'Afrique du Nord(dans la seconde bataille). Le général Claude Auchinlek (première bataille), et le général Harold Alexander (seconde bataille), commandant le théâtre d'opérations du Moyen-Orient, étaient opposés au maréchal Erwin Rommel, commandant la Panzerarmee-Afrika(et qui fut remplacé du 23 au 26 octobre par le général Stumme pour raisons de santé), qui était sous les ordres du commandant en chef des forces de l'Axe en Afrique, le maréchal Cavallero.
Lors de la première bataille, les Britanniques avaient engagé la VIIIème armée, commandée par le général Auchinlek, soit 35 000 hommes et 160 chars, tandis que les Allemands avaient engagé la Panzerarmee, les 10ème, 20ème, et 21ème CA Italiens, soit 20 000 hommes et 90 chars.
Lors de la seconde bataille les Britanniques avaient engagé la VIIIème armée, commandée par le général Bernard Law Montgomery, soit 200 000 hommes, et 1 029 chars, tandis que les Allemands avaient engagé les forces Germano-Italiennes, soit 104 000 hommes, et 489 chars.
C'est le 30 juin 1942, que les Panzerdivisions de Rommel arrivèrent à El-Alamein, situé à 100 kilomètres à l'ouest d'Alexandrie.
Elles y arrêtèrent leur progression pour attendre le reste de l'Afrikakorps et les divisions Italiennes. Les divisions blindées Britanniques purent ainsi se regrouper derrière la ligne d'El-Alamein, qui était la dernière position de défense possible sur la route du Caire. Cette ligne était bordée au nord par la Méditerranée, au sud par des marécages situés dans la dépression de Qattara, et était longue de 65 kilomètres. Elle était défendue en quatre points fortifiés.
Auchinlek confia le secteur côtier, du périmètre d'El-Alamein à la crête de Ruweiset, à la 9ème DI Australienne et à la 1ère DI Sud-Africaine DU 30ème CA du général Norrie. Le flanc du désert, jusqu'à Qattara, était défendu par le 13ème CA du général Gott, et était composé de la DI Néo-Zélandaise, et des 1ère et 7ème DB Britanniques.
Le 1er juillet 1942, Rommel lança une offensive avec 6 500 hommes et 90 chars, entre les crêtes de Ruweiset et de Miteiriya. Il voulait percer le front ennemi, puis remonter vers le nord, pour prendre à revers les défenseurs d'El-Alamein. Mais il fut immobilisé jusqu'à la tombée de la nuit par le point fortifié de Deir el Shein, dont il ignorait l'existence. Il prit Deir el Shein, mais la percée qu'il voulait faire ne put pas être effectuée. La flotte Britannique d'Alexandrie s'était repliée en mer Rouge.
Le 2 juillet Rommel réattaqua avec 40 chars mais fut repoussé. Le 3, il réessaya avec la division Italienne Ariete et 26 chars, mais échoua. Du 5 au 22 juillet 1942, Auchinlek lança des offensives successives avec la VIIIème armée, qui réduisirent à 15 les chars qui s'opposaient à la 1ère DB, qui comptait 99 chars. Le 27 juillet 1942, la première bataille d'El-Alamein s'achevait sans vainqueur ni perdant. Les deux armées construisirent alors des tranchées et des fossés, et posèrent des barbelés et des mines antichars (500 000 du côté Allemand).
Rommel attendait des renforts et du carburant de Benghazi et Tripoli, tandis que Auchinlek attendait des hommes et des chars du delta du Nil. En août, Churchill se rendit en Égypte, refusa le report de l'offensive à l'automne, et remplaça Auchinlek par le général Alexander. Il confia le commandement de la VIIIème armée au général Montgomery. Mais Montgomery exigea que ses troupes se reposent, soient renforcées, et réarmées. Cette attente aboutit à la bataille d'Alam Halfa.
Les Britanniques disposaient désormais de 700 chars, dont 160 chars Grant. Rommel disposait à la fin du mois d'août de 2 DB Italiennes, qui avaient 240 chars périmés, et de 2 Panzerdivisions, qui disposaient de 200 chars, dont une centaine de Panzer III, et IV armés de meilleurs canons. Rommel envisagea une percée au sud, car le nord, d'El-Alamein à la crête d'Alam Nayil était trop bien défendu, puis une progression des blindés d'une cinquantaine de kilomètres vers l'est, qui serait suivie d'un virage vers le nord-est, qui lui permettraient d'atteindre les lignes de communications de la VIIIème armée, et d'attirer les blindés Britanniques afin de les encercler et de les détruire.
L'attaque fut déclenchée dans la nuit du 30 août 1942, mais les blindés furent ralentis par les champs de mines Anglais et les attaques de la RAF. Il prit alors la décision d'obliquer vers le nord, en déplaçant son attaque en direction de la cote 132, qui était le point culminant de la crête d'Alam Halfa.
Le 31 août, au soir, Rommel dut renoncer à son objectif. Rommel organisa alors le repli de ses troupes.
Le 6 septembre, il fit halte sur un plateau, à 10 kilomètres de son point de départ. Le lendemain, avec l'approbation d'Alexander, Montgomery arrêta la bataille. Ce dernier donna 7 semaines à la VIIIème armée pour préparer l'offensive finale. Il prit en compte la pleine lune, qui était nécessaire pour le déminage nocturne des champs de mine, ainsi que du débarquement alliée en Algérie et au Maroc(opération Torch), et décida de déclencher l'opération Lightfoot (Pied Léger) dans la nuit du 23 octobre 1942.
Rommel possédait alors 104 000 hommes, dont 27 000 Allemands, 489 chars, dont seulement 38 Panzers IV armés de canons de 75mm, 750 canons antichars, avec seulement 86 canons antichars de 88mm qui étaient capables de percer le blindage des Grant et des Sherman, 470 pièces d'artillerie, et 350 avions.
Montgomery disposait de 200 000 hommes, de 1 029 chars, dont 252 nouveaux Sherman Américains, de 1 400 canons antichars, de 1 200 pièces d'artillerie, et de 750 appareils. De plus la VIIIème armée disposait de 1 000 chars supplémentaires entreposés en Égypte, et sur l'ensemble des appareils de la RAF au Moyen-Orient 1 500 avions de première ligne.
Rommel manquait de carburant (entre 2/3 et la moitié des pétroliers envoyés en Libye étaient coulés par la Royal Navy, qui opérait à partir de Malte), de munitions, et dont les troupes étaient atteintes de malaria et de dysenterie.
Le dispositif de Rommel s'étendait sur 56 kilomètres, et avait une profondeur de 12 kilomètres. Il était défendu au sud par le 10ème CA Italien, qui comprenait 3 DI et 1 division parachutiste en première ligne, avec en réserve la DB Italienne Ariete et la 21ème Panzer. Le nord était défendu par le 21ème CA, avec 2 DI Italiennes et 1 DI Allemande au premier échelon, et au deuxième échelon la DB Italienne Littorio et la 15ème Panzer. Près de la côte se trouvait la division motorisée Italienne Trieste et la 90ème DI Allemande.
La VIIIème armée Britannique avait placé au nord le 30ème CA avec 5 DI et 2 DB, et au sud le 13ème CA avec 2 DI, la 7ème DB et 2 brigades, dont la 1ère brigade Française Libre.
Montgomery voulait lancer des opérations de diversion au sud, dans le but d'y fixer la 21ème Panzer, et pendant ce temps lancer le gros des troupes au nord, où les DI du 30ème CA détruiraient les DI Italiennes, et la 1ère et la 10 DB, qui seraient postées à l'ouest des champs de mines Allemands, prendraient sous leur feu les contre-attaques des Panzers.
L'offensive fut lancée le 23 octobre 1942, à 21h40, après une forte préparation d'artillerie. Au sud, le 13ème corps réussit l'opération de diversion, mais son avance fut stoppée le 25 octobre. Au nord, les chars des deux DB du Xème CB, ne réussirent pas à s'ancrer sur les crêtes de Kidney et de Miteiriya. Le général Stumme mourut d'un arrêt cardiaque le 24.
Rommel, qui se trouvait à Berlin, envoya toutes ses réserves vers le nord, et lança de nombreuses contre-attaques avec la Db Italienne Littorio et la 15ème Panzer. Le 27, les Britanniques n'avaient toujours pas brisé le front, et n'avaient pas atteints les objectifs. Le 28, Montgomery modifia son dispositif qui était trop rigide, et retira le 10ème CB au nord pour le remplacer par la 7ème DB, qui était remontée du sud, et par la 2ème DI Néo-Zélandaise. Le 1er novembre 1942, Rommel ne disposait plus que de 320 chars, tandis que les Britanniques en avaient encore 800. Le 2 novembre 1942, à 1h du matin, Montgomery déclencha l'opération Supercharge, qui fut menée par la 2ème DI, suivie par les blindés qui avaient reçu l'ordre de « passer à tout prix ». Rommel demanda alors à Hitler l'autorisation de se replier.
Hitler refusa.
Le 4, la 51ème DI Britannique réussit à percer, et les blindés de la 7ème BD passèrent par la brèche. La DB Italienne Ariete fut anéantie, et les divisions Italiennes furent forcer de capituler. Au nord, Rommel fit reculer les formations blindées et motorisées de la Panzerarmee, qui ne comptaient plus que 35 chars.
La première bataille d'El-Alamein et la bataille d'Alam Halfa stoppèrent les offensives de Rommel, et la seconde bataille obligea les Germano-Italiens à battre en retraite.
Les Britanniques avaient perdu 13 000 hommes pour chacune des batailles.
Les Allemands avaient perdu 22 800 hommes, dont 7 000 prisonniers, lors de la première bataille, et 59 000 hommes, ainsi que 454 chars, dans la seconde bataille.
Annexe D – Etat récapitulatif du convoyage d’avions à Malte entre 1940 et 1942
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Quand il déclare la guerre à la Grande-Bretagne en juin 1940, Mussolini espère établir la suprématie de l’Italie dans le Bassin méditerranéen. Mais la Navy va contrecarrer ses projets.
Grâce aux efforts de réarmement déployés dans les années 1930, l’Italie dispose en 1940 de la marine la plus puissante de Méditerranée.
Elle peut aligner des bâtiments modernes et bien armés, même si leur blindage avait parfois été réduit au profit de la vitesse. Mais l’Amirauté britannique dispose d’un avantage décisif.
Certes plus lents et plus anciens, ses navires sont mieux blindés et bénéficient du soutien de porte-avions qui font défaut aux Italiens. Très vite, l’essentiel des affrontements se concentre sur les convois qui ravitaillent les armées du front d’Afrique du Nord.
En juillet, deux batailles navales se soldent pour les Italiens par la perte du croiseur Bartolomeo Colleoni.
A - Attaque surprise
Le 11 novembre 1940, 20 avions anglais armés de torpilles attaquent la base navale italienne de Tarente. La surprise est totale. Un cuirassé est coulé et deux autres mis hors d’état de combattre pour plusieurs mois.
Pendant l’hiver eurent lieu de nombreux engagements de moindre importance, occasionnant des pertes des deux côtés. Au printemps suivant, chaque camp se préparait à la bataille décisive.
En mars 1941, la Luftwaffe annonçe, à tort, avoir endommagé deux des trois cuirassés anglais. Espérant détruire à peu de frais les convois anglais à destination de la Grèce, l’amiral Angelo Iachino se dirigea vers la mer Egée à la tête d’une force composée du cuirassé Vittorio Veneto, de 8 croiseurs et d’une flotille de contre-torpilleurs.
Informés des mouvements italiens grâce au décryptage du code radio ennemi, l’amiral Cunningham prit la mer depuis Alexandrie avec ses trois cuirassés intacts, le porte-avions Formidable et une escorte de destroyers.
Au premier plan, le HMS Renown, croiseur de la Royal Navy. En 1940, ce bâtiment servait en Méditerranée.
Engagé en août 1940, le cuirassé Vittorio Veneto était l'un des plus puissants bâtiments de la marine italienne.
Le 28 mars, le choc a lieu, les deux flottes établissent le contact. Les avions torpilleurs du Formidable endommagent le Vittorio Veneto et immobilisent le croiseur Pola. La bataille se poursuivit pendant la nuit, l’amiral Cunningham s’étant lancé à la poursuite de la flotte italienne qui tentait de regagner ses bases.
Mal renseigné sur la position des Anglais, Iachino envoya 2 croiseurs et 4 contre-torpilleurs pour remorquer le Pola. C’est au large du cap Matapan que ce groupe de secours fut intercepté et presque entièrement coulé par les cuirassés de la Navy. Seuls deux contre-torpilleurs en réchappèrent.
Après avoir recueilli un maximum de rescapés, l’amiral Cunningham envoya un message radio aux Italiens pour leur permettre de localiser les marins qui dérivaient encore à bord de leurs canots de sauvetage.
B - Nouvelle stratégie
Après le désastre du cap Matapan, les Italiens renoncèrent à toute confrontation avec la Navy, sauf lorsqu’ils étaient certains d’avoir une plus grande puissance de feu. Ils lancèrent par ailleurs la construction de deux porte-avions pour donner à leur flotte l’appui aérien dont elle manquait tant. Cela dit, à la fin de la guerre, ces deux bâtiments n’étaient toujours pas achevés. Jusqu’au débarquement en Afrique du Nord, on assista par conséquent à une série de petits engagements. Le 12 décembre 1941, des destroyers britanniques parviennent à surprendre et à couler deux croiseurs italiens.
Cinq jours plus tard, dans le golfe de Syrte, c’est la Navy qui déplore la perte d’un croiseur et d’un destroyer, alors que deux de ses croiseurs sont endommagés. Le 23 mars 1942, un nouvel affrontement se produit dans le golfe de Syrte, avec des pertes sévères des deux côtés.
Dans l’intervalle, il était devenu évident que, pour venir à bout de la Navy, il fallait impérativement s’emparer de Malte, d’où décollent les avions de reconnaissance anglais. Dès lors, l’île devint le premier objectif des forces de l’Axe en Méditerranée.
Annexe B - Le raid sur Tarente
En novembre 1940, l'armée italienne est en train de subir de lourds échecs en Grèce mais sa flotte dans la Méditerranée demeure imposante. De plus, la flotte anglaise ne peut plus compter sur l'appui de la flotte française de Toulon. Il était donc capital de rééquilibrer les forces en Méditerranée.
Durant la nuit du 11 novembre 1940, les Anglais lancent une opération aéronavale dont les Italiens se souviendront et dont les Japonais s'inspireront un an plus tard. Cette attaque a lieu à Tarente où sont stationnés les plus gros navires de la flotte italienne.
La base navale de Tarente, comme toutes les bases navales italiennes, était bien équipée pour la réparation des unités endommagées grâce, surtout, à la présence de grands bassins de carénage et d'un arsenal disposant de toutes les pièces de rechange pour la machinerie et pour les armes. Par contre, la protection anti-aérienne et anti-torpilles des navires basés dans le port avait de graves carences.
Les batteries anti-aériennes étaient insuffisantes tant du point de vue du nombre que du calibre. À cela, il faut ajouter la faible protection nocturne due à l'absence de radar. Par conséquent, le repérage des avions ennemis en approche reposait sur de vieux projecteurs à faible portée, guidés par des aérophones datant de la Première Guerre mondiale.
En ce qui concerne la protection contre les torpilles, elle reposait sur des filets anti-torpilles, également peu nombreux à cause du manque de matière première dont souffrait l'industrie italienne.
La production de filets atteignait 3 600 mètres par mois à répartir entre toutes les bases italiennes et des 12 800 mètres prévus pour la protection des navires positionnés dans le golfe de Tarente, à peine un peu plus de la moitié était arrivée à destination et la plus grande partie n'était pas encore mise en place.
Cuirassé italien. Engagé en août 1940, le cuirassé Vittorio Veneto était l'un des plus puissants bâtiments de la marine italienne.
En août 1940, deux nouvelles unités de guerre de la Regia Marina entrèrent en service : les imposants navires de guerre Vittorio Veneto et Littorio.
D'une longueur de 238 mètres, ils développaient une vitesse maximale de 30 nœuds et avaient un déplacement de 41 300 t standard. La cuirasse seule pesait 13 600 t. L'armement se composait de 9 canons de 381/50 mm répartis en trois tourelles triples, de 12 canons de 152/55 mm et de 12 canons de 90/50 mm. Ils étaient également dotés de 4 de 120/40 mm pouvant tirer des obus éclairant et 20 mitrailleuses anti-aériennes de 37/54 mm et 30 de 20/65 mm.
Deux mois plus tard, les troupes italiennes envahirent l'Epire, dans le cadre de la guerre italo-grecque, obligeant la Grande-Bretagne à s'impliquer militairement aux côtés de la Grèce, autant pour éviter que les Italiens ne finissent par contrôler la mer Egée, mettant ainsi en péril Alexandrie, que pour décourager la Turquie d'entrer dans le conflit au sein de l'Axe.
Cela entraîna une forte augmentation du nombre de convois maritimes britanniques partant de l'Égypte afin d'apporter une fourniture sans cesse plus importante de matériel de guerre aux ports grecs et à l'île de Malte, place-forte britannique stratégique située entre la Sicile et la Tunisie, près de laquelle passaient les convois maritimes italiens en route vers la Libye.
Ces manœuvres se déroulant à proximité de Tarente, l'amirauté britannique se méfiait des navires italiens qui y étaient basés et qui pourraient facilement rejoindre et couler ses convois maritimes.
La Royal Navy, en la personne du Commandant en Chef de la Mediterranean Fleet, l'amiral Andrew Cunningham, décida alors de préparer une opération destinée à couler ou endommager les unités navales italiennes basées à Tarente. Elle perfectionna un plan d'attaque nocturne avec des avions torpilleurs Fairey Swordfish déjà mis au point en 1935 par l'amiral Lumley Lyster lors de la deuxième guerre Italo-Abyssine. Le plan était très risqué et reposait essentiellement sur le facteur surprise.
Les porte-avions d'où devaient décoller les avions accomplissant la mission devaient se rapprocher à moins de 130 milles marins de la côte italienne, au risque d'être découverts par l'ennemi. En outre la rade devait être illuminée en recourant à des avions illuminateurs, pendant que les avions-torpilleurs volaient au ras de l'eau, pour éviter les batteries anti-aériennes et pour éviter que les torpilles ne s'enfoncent dans la vase de la rade.
En fait, si les navires italiens avaient étendu les couvertures de fumigènes, la mission aurait certainement été un échec.
Le Conte di Cavour, coulé par les Swordfish britanniques durant le raid
L'opération « Judgement » débuta le 6 novembre 1940 : les navires de ligne Malaya, Ramillies, Valiant et Warspite, le porte-avions Illustrious, les croiseurs Gloucester et York ainsi que 13 destroyers, partirent d'Alexandrie vers Malte, dans les alentours de laquelle se trouvait le porte-avions Eagle.
Le 8 novembre, alarmé par ces manoeuvres dans la Méditerranée, le Commandement suprême de la Marine italienne envoya une unité de destroyers, torpilleurs et submersibles en patrouille dans le canal de Sicile et fit rassembler dans la base de Tarente la plus grosse partie de la force navale italienne.
Les navires britanniques atteignirent Malte dans la journée du 10 novembre et le jour suivant le porte-avions Illustrious commença à se diriger vers le point de rendez-vous pour lancer ses avions vers Tarente. Le porte-avions Eagle ne put par contre pas appareiller à cause d'une avarie moteur.
Ce contre-temps diminua le nombre d'avions disponibles mais n'empêcha pas l'opération d'avoir lieu.
Les avions britanniques effectuèrent des reconnaissances de Tarente à partir de Malte jusque dans la soirée du 11 novembre, lorsque la Royal Navy apprit que les navires de ligne Andrea Doria, Caio Duilio, Conte di Cavour, Giulio Cesare, Littorio et Vittorio Veneto, les croiseurs lourds Bolzano, Fiume, Gorizia, Pola, Trento, Trieste et Zara, les deux croiseurs légers Luigi Savoia Duca degli Abruzzi et Giuseppe Garibaldi et plusieurs destroyers s'étaient regroupés dans les deux rades de Tarente. Pour citer l'amiral Andrew Cunningham : « Tous les oiseaux étaient dans le nid ».
87 ballons étaient prévus pour défendre le port, mais les mauvaises conditions climatiques des journées précédentes en avaient arraché 60 et ils n'avaient pas encore pu être remplacés à cause du manque d'hydrogène.
Les unités navales étaient protégées par des filets anti-torpilles, mais seulement 4 200 des 8 600 mètres nécessaires pour une défense efficace étaient disposés. Ces filets n'étaient en outre tendus qu'à 10 mètres de profondeur laissant ainsi un espace non protégé entre les filets et le fond marin.
L'amiral Inigo Campioni avait en outre demandé à ce que les filets de protection soient placés à une distance permettant aux navires d'appareiller rapidement sans devoir retirer les protections auparavant.
Le Littorio, gravement endommagé
À 20h30 les avions de la première vague d'attaque décollent du porte-avions Illustrious. Ils arrivent sur l'objectif quelques minutes avant 23h00 et sont accueillis par un puissant tir de barrage. Deux feux de bengale sont lancés pour illuminer le profil des cibles, pendant que 6 avions-torpilleurs Fairey Swordfish descendent à bonne hauteur pour torpiller.
Un premier avion, qui allait être abattu, lâche une torpille sur le Conte di Cavour, qui lui déchire le flanc gauche, deux autres visent le Andrea Doria, sans parvenir à le toucher. En même temps, 4 autres avions-torpilleurs endommagent les destroyers Libeccio et Pessagno et bombardent les dépôts de carburant. À 23h15, deux avions-torpilleurs attaquent en même temps le Littorio, le touchant à bâbord et à tribord, pendant que le dernier Swordfish lance sans succès une torpille contre le Vittorio Veneto.
À 23h20, les avions de la première vague se retirent, mais à 23h30, arrivent ceux de la seconde vague. Malgré le tir de barrage, un premier Swordfish lance une torpille sur le Caio Duilio, le touchant à tribord, pendant que deux avions-torpilleurs touchent le Littorio. Un autre avion vise le Vittorio Veneto qui est une nouvelle fois épargné, pendant qu'un second Swordfish est abattu alors qu'il tentait d'attaquer le Gorizia. Enfin, une dernière attaque endommage gravement le croiseur Trento. Les derniers avions se replient à 00h30 le 12 novembre. L'attaque de Tarente avait fait 59 victimes. En 90 minutes, les avions-torpilleurs de la Royal Navy avaient causé des dommages considérables, la moitié de la force navale italienne était hors service.
C'est un énorme succès pour les Britanniques. Au début de l'année, la Méditerranée était dominée par les six cuirassés, nombreux croiseurs, destroyers et sous-marins italiens. Après 3 mois de combats, la flotte italienne avait perdu deux croiseurs, trois cuirassés et neuf destroyers, perdant ainsi son titre de première puissance navale en Méditerranée.
Le raid de Tarente ne coûta aux Britanniques que deux appareils de la Fleet Air Arm, l'équipage de l'un d'eux s'étant fait capturé. Le ministre de la Marine (V. Alexander) profita de ce succès pour souligner que la Fleet Air Arm avait détruit au moins 55 avions ennemis en Norvège, dans les îles britanniques et en Méditerranée. La RAF s'est alors vu octroyer soixante-huit pilotes provenant de la Marine.
Cette attaque prouva une fois pour toute la menace que représentent les forces aéronavales pour les navires qui mouillent dans des ports. Les Américains ne retinrent pas de leçon de cela et en paieront le prix à Pearl Harbor.
Cette attitude face à la puissance des forces aéronavales remonte à loin. La plupart des grandes puissances ne créèrent pas d'armée de l'air indépendante avant les années 30, malgré les formidables progrès effectués en aéronautique depuis la Première Guerre mondiale, où la force aérienne avait pu s'illustrer ... mais elle fut oubliée.
Annexe C – La guerre du désert : juin 1940 / mars 1943
A – Introduction
Il n’est pas inutile de rappeler sommairement les principales phases de ce que l’on a pu appeler « la guerre du désert », cette dernière étant étroitement liée aux événements qui se sont déroulés à Malte. Plus la situation à Malte se détériorera pour les britanniques, plus le ravitaillement parviendra à l’Afrika Korps dans de bonnes conditions. En parallèle, lorsque les britanniques se ressaisiront à Malte, c’est la DAK qui ira de défaites en défaites, le ravitaillement ne se faisant plus qu’au compte-goutte…
Malte était perçue comme « l’infection à guérir », selon Hitler. De fait, l’île était une véritable épine dans le pied des forces de l’Axe, de par sa situation stratégique, et sa capacité à fortement gêner le ravitaillement de l’Axe en Afrique.
Et l’échec de l’Axe à la neutraliser précipitera sa défaite en Afrique du Nord…
La guerre du désert est donc un épisode de la Seconde Guerre mondiale généralement traité à part compte tenu de sa chronique et de sa durée. Elle oppose l'armée coloniale libyenne de l'Empire italien à la huitième armée britannique gardant l'Égypte ; les forces de l'Axe sont bientôt reconfigurées sous l'égide du Deutsches Afrika Korps. La guerre du désert proprement dite est prolongée par la campagne de Tunisie, et s'achève par la prise de contrôle de l'Afrique du Nord par les Alliés.
Le désert de cette partie de la campagne d'Afrique du Nord se révéla un théâtre périphérique d'importance pour les forces de l'Axe comme les Alliés vis-à-vis des fronts du théâtre européen. Les ressources stratégiques dans l'objectif des forces de l'Axe étaient considérables, mais les moyens furent mobilisés dans la « croisade contre le bolchevisme », ainsi que la propagande hitlérienne nomma l'agression contre l'URSS.
Elle connaît trois étapes : commencée par les Italiens sur un principe colonial visant à restaurer la primauté d'un empire néo-romain sur le bassin méditerranéen par la jonction de la Libye avec l'Abyssinie, colonie italienne matée dans le sang, elle se poursuit par une intervention du corps expéditionnaire allemand visant à ouvrir l'accès aux champs pétrolifères du Moyen-Orient une fois sauté le verrou britannique du Caire. Rommel n'y parvint jamais faute de moyens. La troisième étape est le reflux des italo-allemands hors de Libye jusqu'au début de 1943, sur les plages de Tunisie où prit fin l'aventure dite chevaleresque de ces combats où la chance et le hasard eurent leur mot à dire. La guerre du désert s'était achevée avec les débarquements américains en Afrique du Nord.
La défaite de Rommel, perceptible après la seconde bataille d'El Alamein est considérée comme un des tournants de la guerre.
L'aspect chevaleresque est aussi largement dû à la légende instaurée autour des exploits du général Rommel, qui amena au limogeage de ses adversaires successifs britanniques placés à la tête de la 8e armée en Égypte. Chacun reconnut avoir eu affaire à un ennemi exceptionnel par son acuité sur le terrain. Tout ceci se déroulait alors que le front de l'Est devenait une tuerie d'une horreur époustouflante.
Le flux et le reflux des armées le long des côtes tripolitaines et cyrénaïques selon le rapport des forces et les vicissitudes de l'approvisionnement par la Méditerranée donnent le particularisme de cet épisode du conflit.
B - Les 3 phases de la guerre du désert
1 - La guerre des Italiens, de septembre 1940 à janvier 1941
En septembre 1940, les troupes italiennes du maréchal Rodolfo Graziani, en Libye, attaquèrent l'Égypte, mais se heurtèrent à une contre-offensive anglaise. Hitler dut soutenir les troupes italiennes en Afrique du Nord et envoya dans ce but l'Afrikakorps sous les ordres du général Rommel.
2 - Le renard du désert, de février 1941 (nomination de Rommel) à juillet 1942 (le DAK à la frontière égyptienne)
Erwin Rommel est officiellement mandaté le 6 février 1941. Il arrive à Tripoli et part directement en reconnaissance par avion au-dessus du désert. Il ne suit pas ses instructions qui sont d'attendre le débarquement des renforts constituant le corps expéditionnaire allemand, et reprend l'offensive dès que possible au grand dam de la hiérarchie italienne.
Le 31 mars 1941, Rommel avait repoussé les troupes britanniques de la Libye jusqu'aux frontières de l'Égypte. Le 26 mai, Rommel lança la sixième campagne de Libye, prit Tobrouk le 20 juin.
La première bataille d'El Alamein, en Égypte a opposé les forces de l'Axe dirigées par le général Rommel à la huitième armée britannique commandée par Claude Auchinleck.
Suite à leur défaite lors de la bataille de Gazala, les alliés s'étaient repliés sur une ligne défensive, entre El Alamein, au bord de la mer, et la dépression de Qattara dans le désert. Ils souhaitaient ainsi protéger Alexandrie, Le Caire et le canal de Suez. L'offensive de l'Afrika Korps, lancée le 1er juillet, ne permit pas à Rommel de percer les lignes britanniques. Il s'ensuivit une série de contre-attaques, de part et d'autre, pendant tout le mois de juillet, qui ne procurèrent pas d'avantage décisif aux belligérants. Cependant, l'avance des Allemands et des Italiens ayant été stoppée, on peut considérer qu'il s'agit d'une victoire pour les Alliés.
Rommel subit, à Bir-Hakeim, un revers majeur infligé par les forces de la France Libre commandées par le général Koenig. Bir-Hakeim scelle ainsi l'issue de la guerre du désert préparant le terrain à la seconde bataille d'El Alamein remportée par Bernard Montgomery qui refoula définitivement les forces de l'Axe du territoire libyen fin 1942.
3 - La fin du Deutsches Afrika Korps, d’août 1942 (nomination de Monty) au 12 mai 1943 (reddition du Korps)
En octobre-novembre 1942, le sort de cette guerre se joue à nouveau à El Alamein : l'armée britannique, pendant l'été et le début de l'automne, parvient à reconstituer ses forces, ce qui lui permettra de mener une offensive décisive lors de la seconde bataille d'El Alamein. Cette victoire alliée marque un tournant important dans la campagne d'Afrique du Nord, lors de la Seconde Guerre mondiale.
Certains historiens estiment que la bataille d'El Alamein est l'une des victoires majeures qui ont contribué à la victoire alliée en Afrique du Nord. En novembre 1942, Winston Churchill résuma cette bataille dans les termes suivants : « Ce n'est pas la fin, ni même le commencement de la fin. Mais c'est peut-être la fin du commencement ».
Le débarquement allié en Afrique du Nord en novembre 1942 place Rommel dans une situation intenable. Sa santé s'est de plus gravement altérée. Il est rappelé en Allemagne au pire moment pour ses troupes.
C – Les principales batailles de la période du DAK
Batailles
1941 :
Opération Battleaxe
Le siège de Tobrouk
Opération Crusader
1942 :
Bataille de Bir-Hakeim
Première bataille d'El Alamein
Seconde bataille d'El Alamein
1 – Opération « Battle Axe » - Du 15 au 17 juin 1940 – Lieu : Cyrénaïque, Lybie
L’opération Battleaxe, également connue sous le nom de bataille de Sollum, est une opération conduite par l'armée britannique en juin 1941.
Elle visait à chasser les armées allemande et italienne de l'est de la Cyrénaïque, afin notamment de lever le siège de Tobrouk. C'est la première fois de la guerre où des forces allemandes significatives se retrouvaient sur la défensive.
L'opération fut néanmoins un échec, car l'assaut initial des forces britanniques se heurta à de solides positions défensives organisées par le général Erwin Rommel. Les Britanniques perdirent plus de la moitié de leurs tanks dès le premier jour et ne réussirent que sur l'une de leurs trois zones de poussée. Le deuxième jour, ils obtinrent des résultats mitigés en étant repoussés sur leur flanc ouest, mais en arrêtant une importante contre-attaque allemande sur leur centre. Le troisième jour, les Britanniques évitèrent de justesse un désastre complet en se retirant avec succès juste avant d'être encerclés par les Allemands.
L'échec de cette opération conduit au remplacement du général Archibald Wavell, commandant en chef des opérations au Moyen-Orient.
2 – Le siège de Tobrouk - Du 10 avril au 27 novembre 1941 - Lieu : Tobrouk (Libye)
Le siège de Tobrouk a été un affrontement entre les forces de l'Axe et celles des Alliés en Libye au cours de la guerre du désert. Le siège a commencé le 10 avril 1941 lorsque Tobrouk a été attaqué par les forces italo-allemandes du lieutenant général Erwin Rommel et a continué pendant 240 jours, quand il a été stoppé par la 8e armée britannique lors de l'opération Crusader.
Les Britanniques voulaient empêcher les Italiens et les Allemands de s'emparer de Tobrouk, qui disposait d'un port et d'une station d'épuration d'eau, qui leur étaient nécessaires pour la poursuite de la guerre en Libye. Le général Archibald Wavell, commandant en chef des armées de terre britanniques au Moyen-Orient (il fut remplacé par le général Claude Auchinleck), était opposé au général Erwin Rommel, qui était sous les ordres du maréchal Italo Gariboldi, qui était le commandant suprême des forces de l'Axe en Afrique du Nord.
Les Alliés avaient engagé la 2e division blindée et la 9e division d'infanterie australienne, soit 23 000 hommes. Les forces de l'Axe avaient engagé la 5e division légère allemande, la division blindée italienne Ariete, et deux divisions d'infanterie italiennes, soit au total 100 000 hommes.
Tobrouk était le seul bon port en eau profonde de l'Afrique du Nord, entre l'Égypte et la Tunisie. Ce port était un enjeu stratégique, qui opposa en 1941 et 1942 les Britanniques et les Italo-Allemands. Le 21 janvier 1941, le général O'Connor s'était emparé de Sidi Barrani. Le 12 février, alors qu'il pouvait chasser définitivement les Italiens de Libye, Churchill lui ordonna d'arrêter l'offensive. O'Connor fut relevé de son commandement, et les 7e DB et 6e DI furent remplacées par le Cyrenaica Command, qui était composé de deux divisions inexpérimentées : la 2e division blindée Britannique et la 9e division d'infanterie australienne.
Le même jour, le général Erwin Rommel arrivait à Tripoli. Il avait été envoyé par Hitler à la tête de l'Afrikakorps (5e division légère et 15e division Panzer), pour secourir les Italiens. Il devait tenir Tripoli. Mais il ignora les ordres du maréchal Gariboldi, et passa à l'offensive contre le Cyrénaica Command, le 24 mars 1941. Il attaqua avec deux divisions d'infanterie Italiennes, la division blindée Ariete, la 5e DL (qui allait devenir la 21e division Panzer), et un régiment de chars de la 15e division Panzer. Rommel reprit El Agheila et Adjedabia. Les blindés du général Von Prittwitz prirent la direction de Tobrouk. Cette ville, qui était un port-forteresse, risquait de lui interdire la poursuite de son offensive en direction de l'Égypte.
Tobrouk permettait aux Britanniques de recevoir des renforts en hommes et en matériel. Le général Wavell, aidé par l'amiral Cunningham, fit renforcer le périmètre défensif autour de la ville, qui était profond de 50 kilomètres, avec des lignes d'ouvrages bétonnés, des fossés antichars, et des champs de mines. Il confia ce périmètre au général Leslie Morshead, qui disposait de quatre brigades d'infanterie Australiennes, d'une partie de la 3e division blindée et de quatre régiments d'artillerie. À Bardia, près de la frontière, le général Gott mit en place un corps d'armée qui devait venir soutenir les défenseurs de Tobrouk.
Benghazi tomba aux mains des forces de l'Axe le 5 avril, suivit de Derna le 7, et de Bardia, le 9. Le 15 avril, Rommel, après avoir parcouru 800 kilomètres en trois semaines, atteignit la passe d'Halfaya. Le 11 et le 15 avril, la 9e division d'infanterie australienne, qui était repliée derrière les lignes fortifiées de Tobrouk, repoussa les attaques allemandes.
La ville fut assaillie, et Prittwitz ayant été tué au combat, Rommel prit la direction des opérations. Il lança alors des assauts blindés, qui étaient appuyés par des bombardiers en piqué, mais ils furent repoussés. Le 30, les Allemands lancèrent une attaque de grande envergure. Ils réussirent à progresser, mais ils durent se replier cinq jours plus tard, le 4 mai. Tobrouk fut bombardée pendant des semaines par l'artillerie et l'aviation ennemies.
Wavell lança alors deux opérations qui devaient secourir les assiégés. La première, qui avait pour nom de code "Brevity", se déroula vers la mi-mai mais échoua. La seconde, qui s'appelait "Battleaxe", se déroula du 15 au 16 juin, et n'eut pas plus de résultats que la première. Le 21 juin, le général Wavell fut remplacé par le général Claude Auchinleck. Les deux camps avaient renforcés leurs effectifs : Rommel disposait désormais de la 90e division légère, de la 21e Panzer (ancienne 5e DL), de la 15e Panzer, de la division blindée Ariete, et de la 6e d'infanterie italienne, soit 150 000 hommes et 588 chars. Les Britanniques, qui avaient été victorieux en Éthiopie, concentraient tous leurs efforts sur la Libye, qui était devenue le seul théâtre d'opérations d'Afrique. 200 chars britanniques Mathilda et Crusader arrivèrent au Caire.
En septembre, Auchinleck fit remplacer les Australiens par la brigade polonaise des Carpates du général Kopański, et la 70e division d'infanterie britannique du général Scobie, qui avait été nommé à la place de Morshead. Il créa la VIIIe armée, qui fut confiée au général Cunningham, et qui rassemblait le 13e corps d'infanterie, et le 30e corps blindé (118 000 hommes et 724 chars). Elle avait pour mission de délivrer la ville.
C'est le 18 novembre, que l'opération Crusader fut déclenchée. Le 13e corps d'infanterie essaya de tourner la passe d'Halfaya, qui était tenue par les Italo-Allemands. Le 30e corps blindé attaqua Rommel par surprise à Sidi Rezegh, au sud-est de Tobrouk. Du 20 au 22 novembre, les Britanniques perdirent 200 chars lors de la bataille de Sidi Rezegh. Auchinleck se rendit sur place le 23, et remplaça Cunningham (qui voulait battre en retraite) par le général Ritchie, et décida de tenir les hauteurs de Sidi Rezegh.
Rommel, après avoir vu qu'il ne pouvait pas tenir cette situation, ordonna la retraite, en abandonnant la 55e division d'infanterie italienne à Halfaya. Le 26 novembre, après que la 1re division d'infanterie néo-zélandaise eut délogé la 90e division légère allemande de Sidi Rezegh, la garnison de Tobrouk fit une sortie pour s'emparer d'El Duda, et les hommes de Scobie et de Ritchie firent leur jonction.
Le siège de la ville était terminé, il avait duré 240 jours, coûté 27 bâtiments à la Royal Navy, et sauvé l'Égypte d'une invasion par les forces de l'Axe. Le 30 décembre 1941, Rommel se retrouva au point de départ de sa campagne, à El Agheila. Juste pour la bataille finale, les Alliés avaient eu 18 000 tués et blessés, tandis que les forces de l'Axe comptaient 38 000 tués et blessés.
3 – Opération « Crusader » - Du 19 novembre au 17 décembre 1941 - Lieu : frontière Lybio-Egyptienne
Après l'échec de l'opération Battle Axe, les Britanniques ont besoin d'une victoire pour remonter le moral de leurs troupes et de leur population. L'arrivée d'Auchinleck à la tête du front à la place de Wavell change les habitudes britanniques dans le désert. L'opération a lieu après un été sans combat, lors duquel les deux adversaires se sont renforcés.
C'est à partir de la mi-novembre 1941 que débute l'opération Crusader, qui par sa confusion est une bataille caractéristique de la Seconde Guerre mondiale.
Les débuts britanniques sont difficiles et les allemands infligent de très lourdes pertes à leurs forces blindées, notamment à Sidi Rezeigh : tout laisse à penser que l'opération Crusader risque d'être encore plus catastrophique que l'opération Battle Axe.
Mais les Britanniques et leurs alliées du Commonwealth réagissent et infligent aux troupes allemandes de lourdes pertes et, peu de temps après, ceux-ci sont obligés de battre en retraite à Gazala et d'abandonner le siège de Tobrouk.
Enfin, le 15 décembre, Erwin Rommel doit se replier sous la pression britannique et abandonner toute la Cyrénaïque aux Britanniques.
4 – Bataille de « Bir Hakeim » - Du 26 mai au 11 juin 1942 - Lieu : Bir Hakeim (Libye)
Bir Hakeim est un point d'eau désaffecté au milieu du désert de Libye, auprès duquel avait jadis existé un fortin turc. Pendant seize jours, du 26 mai au 11 juin 1942, la première brigade française libre du général Kœnig y résista aux attaques des armées motorisées italiennes et allemandes (l'Afrika Korps) du général Rommel.
Le répit, ainsi gagné par les Français libres, permit aux Britanniques, en mauvaise posture, de se replier et de triompher par la suite à El Alamein. Le général Saint-Hillier dira en octobre 1991 dans un entretien : « Il fallut qu'un grain de sable enrayât l'avance italo-allemande, qui n'atteignit El-Alamein qu'après l'arrivée des divisions britanniques fraîches : le grain de sable s'appelait Bir Hakeim ».
5 – Les deux batailles « d’El Alamein » - Du 1er juillet au 27 juillet 1942 et du 23 octobre au 3 novembre 1942 - Lieu : El Alamein en Égypte
Rommel voulait atteindre Le Caire, et la VIIIème armée Britannique avait pour mission d'arrêter l'avance des Italo-Allemands(dans la première bataille) et de les repousser d'Afrique du Nord(dans la seconde bataille). Le général Claude Auchinlek (première bataille), et le général Harold Alexander (seconde bataille), commandant le théâtre d'opérations du Moyen-Orient, étaient opposés au maréchal Erwin Rommel, commandant la Panzerarmee-Afrika(et qui fut remplacé du 23 au 26 octobre par le général Stumme pour raisons de santé), qui était sous les ordres du commandant en chef des forces de l'Axe en Afrique, le maréchal Cavallero.
Lors de la première bataille, les Britanniques avaient engagé la VIIIème armée, commandée par le général Auchinlek, soit 35 000 hommes et 160 chars, tandis que les Allemands avaient engagé la Panzerarmee, les 10ème, 20ème, et 21ème CA Italiens, soit 20 000 hommes et 90 chars.
Lors de la seconde bataille les Britanniques avaient engagé la VIIIème armée, commandée par le général Bernard Law Montgomery, soit 200 000 hommes, et 1 029 chars, tandis que les Allemands avaient engagé les forces Germano-Italiennes, soit 104 000 hommes, et 489 chars.
C'est le 30 juin 1942, que les Panzerdivisions de Rommel arrivèrent à El-Alamein, situé à 100 kilomètres à l'ouest d'Alexandrie.
Elles y arrêtèrent leur progression pour attendre le reste de l'Afrikakorps et les divisions Italiennes. Les divisions blindées Britanniques purent ainsi se regrouper derrière la ligne d'El-Alamein, qui était la dernière position de défense possible sur la route du Caire. Cette ligne était bordée au nord par la Méditerranée, au sud par des marécages situés dans la dépression de Qattara, et était longue de 65 kilomètres. Elle était défendue en quatre points fortifiés.
Auchinlek confia le secteur côtier, du périmètre d'El-Alamein à la crête de Ruweiset, à la 9ème DI Australienne et à la 1ère DI Sud-Africaine DU 30ème CA du général Norrie. Le flanc du désert, jusqu'à Qattara, était défendu par le 13ème CA du général Gott, et était composé de la DI Néo-Zélandaise, et des 1ère et 7ème DB Britanniques.
Le 1er juillet 1942, Rommel lança une offensive avec 6 500 hommes et 90 chars, entre les crêtes de Ruweiset et de Miteiriya. Il voulait percer le front ennemi, puis remonter vers le nord, pour prendre à revers les défenseurs d'El-Alamein. Mais il fut immobilisé jusqu'à la tombée de la nuit par le point fortifié de Deir el Shein, dont il ignorait l'existence. Il prit Deir el Shein, mais la percée qu'il voulait faire ne put pas être effectuée. La flotte Britannique d'Alexandrie s'était repliée en mer Rouge.
Le 2 juillet Rommel réattaqua avec 40 chars mais fut repoussé. Le 3, il réessaya avec la division Italienne Ariete et 26 chars, mais échoua. Du 5 au 22 juillet 1942, Auchinlek lança des offensives successives avec la VIIIème armée, qui réduisirent à 15 les chars qui s'opposaient à la 1ère DB, qui comptait 99 chars. Le 27 juillet 1942, la première bataille d'El-Alamein s'achevait sans vainqueur ni perdant. Les deux armées construisirent alors des tranchées et des fossés, et posèrent des barbelés et des mines antichars (500 000 du côté Allemand).
Rommel attendait des renforts et du carburant de Benghazi et Tripoli, tandis que Auchinlek attendait des hommes et des chars du delta du Nil. En août, Churchill se rendit en Égypte, refusa le report de l'offensive à l'automne, et remplaça Auchinlek par le général Alexander. Il confia le commandement de la VIIIème armée au général Montgomery. Mais Montgomery exigea que ses troupes se reposent, soient renforcées, et réarmées. Cette attente aboutit à la bataille d'Alam Halfa.
Les Britanniques disposaient désormais de 700 chars, dont 160 chars Grant. Rommel disposait à la fin du mois d'août de 2 DB Italiennes, qui avaient 240 chars périmés, et de 2 Panzerdivisions, qui disposaient de 200 chars, dont une centaine de Panzer III, et IV armés de meilleurs canons. Rommel envisagea une percée au sud, car le nord, d'El-Alamein à la crête d'Alam Nayil était trop bien défendu, puis une progression des blindés d'une cinquantaine de kilomètres vers l'est, qui serait suivie d'un virage vers le nord-est, qui lui permettraient d'atteindre les lignes de communications de la VIIIème armée, et d'attirer les blindés Britanniques afin de les encercler et de les détruire.
L'attaque fut déclenchée dans la nuit du 30 août 1942, mais les blindés furent ralentis par les champs de mines Anglais et les attaques de la RAF. Il prit alors la décision d'obliquer vers le nord, en déplaçant son attaque en direction de la cote 132, qui était le point culminant de la crête d'Alam Halfa.
Le 31 août, au soir, Rommel dut renoncer à son objectif. Rommel organisa alors le repli de ses troupes.
Le 6 septembre, il fit halte sur un plateau, à 10 kilomètres de son point de départ. Le lendemain, avec l'approbation d'Alexander, Montgomery arrêta la bataille. Ce dernier donna 7 semaines à la VIIIème armée pour préparer l'offensive finale. Il prit en compte la pleine lune, qui était nécessaire pour le déminage nocturne des champs de mine, ainsi que du débarquement alliée en Algérie et au Maroc(opération Torch), et décida de déclencher l'opération Lightfoot (Pied Léger) dans la nuit du 23 octobre 1942.
Rommel possédait alors 104 000 hommes, dont 27 000 Allemands, 489 chars, dont seulement 38 Panzers IV armés de canons de 75mm, 750 canons antichars, avec seulement 86 canons antichars de 88mm qui étaient capables de percer le blindage des Grant et des Sherman, 470 pièces d'artillerie, et 350 avions.
Montgomery disposait de 200 000 hommes, de 1 029 chars, dont 252 nouveaux Sherman Américains, de 1 400 canons antichars, de 1 200 pièces d'artillerie, et de 750 appareils. De plus la VIIIème armée disposait de 1 000 chars supplémentaires entreposés en Égypte, et sur l'ensemble des appareils de la RAF au Moyen-Orient 1 500 avions de première ligne.
Rommel manquait de carburant (entre 2/3 et la moitié des pétroliers envoyés en Libye étaient coulés par la Royal Navy, qui opérait à partir de Malte), de munitions, et dont les troupes étaient atteintes de malaria et de dysenterie.
Le dispositif de Rommel s'étendait sur 56 kilomètres, et avait une profondeur de 12 kilomètres. Il était défendu au sud par le 10ème CA Italien, qui comprenait 3 DI et 1 division parachutiste en première ligne, avec en réserve la DB Italienne Ariete et la 21ème Panzer. Le nord était défendu par le 21ème CA, avec 2 DI Italiennes et 1 DI Allemande au premier échelon, et au deuxième échelon la DB Italienne Littorio et la 15ème Panzer. Près de la côte se trouvait la division motorisée Italienne Trieste et la 90ème DI Allemande.
La VIIIème armée Britannique avait placé au nord le 30ème CA avec 5 DI et 2 DB, et au sud le 13ème CA avec 2 DI, la 7ème DB et 2 brigades, dont la 1ère brigade Française Libre.
Montgomery voulait lancer des opérations de diversion au sud, dans le but d'y fixer la 21ème Panzer, et pendant ce temps lancer le gros des troupes au nord, où les DI du 30ème CA détruiraient les DI Italiennes, et la 1ère et la 10 DB, qui seraient postées à l'ouest des champs de mines Allemands, prendraient sous leur feu les contre-attaques des Panzers.
L'offensive fut lancée le 23 octobre 1942, à 21h40, après une forte préparation d'artillerie. Au sud, le 13ème corps réussit l'opération de diversion, mais son avance fut stoppée le 25 octobre. Au nord, les chars des deux DB du Xème CB, ne réussirent pas à s'ancrer sur les crêtes de Kidney et de Miteiriya. Le général Stumme mourut d'un arrêt cardiaque le 24.
Rommel, qui se trouvait à Berlin, envoya toutes ses réserves vers le nord, et lança de nombreuses contre-attaques avec la Db Italienne Littorio et la 15ème Panzer. Le 27, les Britanniques n'avaient toujours pas brisé le front, et n'avaient pas atteints les objectifs. Le 28, Montgomery modifia son dispositif qui était trop rigide, et retira le 10ème CB au nord pour le remplacer par la 7ème DB, qui était remontée du sud, et par la 2ème DI Néo-Zélandaise. Le 1er novembre 1942, Rommel ne disposait plus que de 320 chars, tandis que les Britanniques en avaient encore 800. Le 2 novembre 1942, à 1h du matin, Montgomery déclencha l'opération Supercharge, qui fut menée par la 2ème DI, suivie par les blindés qui avaient reçu l'ordre de « passer à tout prix ». Rommel demanda alors à Hitler l'autorisation de se replier.
Hitler refusa.
Le 4, la 51ème DI Britannique réussit à percer, et les blindés de la 7ème BD passèrent par la brèche. La DB Italienne Ariete fut anéantie, et les divisions Italiennes furent forcer de capituler. Au nord, Rommel fit reculer les formations blindées et motorisées de la Panzerarmee, qui ne comptaient plus que 35 chars.
La première bataille d'El-Alamein et la bataille d'Alam Halfa stoppèrent les offensives de Rommel, et la seconde bataille obligea les Germano-Italiens à battre en retraite.
Les Britanniques avaient perdu 13 000 hommes pour chacune des batailles.
Les Allemands avaient perdu 22 800 hommes, dont 7 000 prisonniers, lors de la première bataille, et 59 000 hommes, ainsi que 454 chars, dans la seconde bataille.
Annexe D – Etat récapitulatif du convoyage d’avions à Malte entre 1940 et 1942
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